La recherche épidémiologique en santé mentale de l'enfant est peu développée en France, comme l'atteste le très petit nombre de publications, notamment en langue française. Cet article vise à montrer l'apport de l'épidémiologie à la connaissance de la pathologie mentale de l'enfant, principalement dans sa composante d'épidémiologie descriptive (la plus développée actuellement), mais aussi dans ses dimensions d'épidémiologie explicative et évaluative. On a donc mené ici une réflexion méthodologique sur les techniques utilisées, leur intérêt et leurs limites, en s'appuyant sur des exemples concrets issus de la littérature internationale. On constate, par exemple, l'extrême disparité des chiffres de prévalence de désordres psychiatriques, du fait notamment de problèmes de diversité dans les définitions utilisées, et dans les lieux et techniques de recueil des données (outils de dépistage et classifications diagnostiques notamment). Seules les études menées dans des échantillons représentatifs de la population générale permettent une évaluation fiable de la fréquence, mais elles sont lourdes et coûteuses, de même que les études longitudinales, et tout particulièrement les suivis de cohortes de naissances, dont l'intérêt principal est de permettre l'identification, dès la petite enfance, de facteurs prédictifs de troubles mentaux. Des domaines entiers sont à développer, tels que l'épidémiologie génétique en pathologie mentale, les essais thérapeutiques ou l'évaluation de programmes d'intervention. L'approche épidémiologique peut permettre l'évaluation des besoins en services, l'identification de « groupes à risques » et une approche scientifique des facteurs explicatifs. Dans les pays tels que la France où la quasi-totalité des enfants est scolarisée à trois ans, il faut faire de l'école un lieu de dépistage précoce, ce qui suppose un considérable renforcement des moyens et une politique innovante de formation des personnels de santé, notamment dans le domaine de la santé mentale.

Epidemiological research on the mental health of children is not well developed in France, as demonstrated by the very small number of publications on the subject, especially in French. The purpose of this article is to show the contribution of epidemiology to an understanding of childhood mental illness. We emphasize descriptive epidemiology (currently the most developed component), but discuss analytic and evaluative epidemiology as well. We have thus considered methodological issues related to the advantages and limitations of techniques employed, using concrete examples from international publications. For example, an extensive review of the literature reveals considerable disparity in figures on the prevalence of psychiatric disorders, chiefly because of problems of variation in definitions used and in the places and techniques of data collection (especially screening tools and diagnostic classifications). Only studies carried out in representative samples of the general population allow reliable evaluation of frequency, but these are particularly difficult and costly. The same may be said for follow-up studies, in particular those on birth cohorts, whose principle importance is that they enable the identification of predictive factors for mental disorders, starting from earliest childhood. Entire areas are currently in need of development, such as the genetic epidemiology in mental illness, clinical trials, or the evaluation of programs. Epidemiology enables the evaluation of service needs, the identification of risk groups' and a scientific approach to explanatory factors. In a country such as France where nearly all children are in the school system from the age of 3 years on, schools should become a place for early detection, which assumes a considerable increase in the means available and an innovative policy in the training of health personnel, especially in the area of mental health.