Ce texte est le résultat de plus de quarante années de recherches ethnologiques concernant les pratiques de médecines populaires et de sorcellerie, d’abord dans les campagnes françaises puis en d’autres lieux. À travers ces lignes, j’aborde essentiellement les perceptions et représentations de la maladie, de la santé et de la mort correspondant à un héritage culturel médico-magique et magico-religieux, ce que j’ai parfois nommé : « concept populaire de maladie » ou, comme l’a formulé Claudine Herzlich : « l’ancien régime du mal ». Inventorier et analyser les notions qui constituent ces représentations du corps, de la santé et de la maladie dans leur rapport à la nature, au sacré et à la symbolique est l’objet de ce travail. Malgré près de deux siècles de positivisme et de développement scientifique, ces références, véhiculées par la tradition, perdurent au sein de nos populations, rurales et autres. Il semble important, dans une démarche thérapeutique de prendre en considération ces données, fortement enracinées, qui conditionnent le rapport patient–thérapeute ; l’inverse serait préjudiciable à la cure.

This text is the result of forty years of joint practice of physiotherapy and ethnological research in the French countryside. During this time, I tried to understand why folk medicine remained a reference for much of the rural population in spite of scientific progress. I made enquiries with many people, which were recorded and analysed. This work is a summary of perceptions and representations about diseases, obsessions with sickness, medicine, therapies, and death. Now I try to show some of principal concepts used to explain the origins of health disturbances in the popular imagination. These include: the body and its limits; signs and influences of the macrocosm (the seasons, the moon, the south wind, stars and comets, the cry of the owl); divine punishment; fatality; witchcraft. I also examine foreign influences like Eastern medicine and the role of New Age movements, which consolidate and confirm some older traditions. It is possible to collect similar perceptions and uses in urban populations. I suggest that there is a resurgence of popular medical traditions in our time that can be explained by the discrepancy between scientific explanations and cultural representations concerning health.