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Algorithme pour le diagnostic clinique - 09/12/08

D. Lipsker

Le diagnostic d’une maladie de la peau peut se faire de deux façons. Le médecin peut reconnaître une maladie qu’il a déjà vue au préalable : il s’agit alors d’un raisonnement analogique. Cela suppose de l’expérience et une mémoire visuelle. Ailleurs, l’examinateur recueille tous les signes présents et formule, à partir de ces signes, un ou plusieurs diagnostics différentiels : il s’agit alors d’un raisonnement analytique. Cela implique la capacité d’identifier correctement les signes présents (séméiologie) et de pouvoir les intégrer dans un raisonnement diagnostique, donc de connaître les signes des différentes maladies (nosologie). Cette démarche permet de diagnostiquer des maladies sans les avoir vues au préalable. Dans ce chapitre un algorithme permettant de réaliser une démarche diagnostique analytique est proposé. Un algorithme a des avantages et des inconvénients. Il est particulièrement utile dans deux situations :

pour le « débutant », un algorithme permet de suivre une démarche diagnostique cohérente et de formuler un diagnostic différentiel, sans aucune expérience préalable, ce qui est particulièrement difficile dans une discipline qui implique une reconnaissance visuelle comme la dermatologie. Cela est tout autant vrai pour d’autres disciplines visuelles comme la radiologie ou l’anatomopathologie ;
pour le médecin chevronné, le recours à l’algorithme peut être utile lorsqu’il bute sur un diagnostic et qu’il n’arrive pas à formuler un diagnostic différentiel satisfaisant ; dans ce cas, l’utilisation d’un algorithme et la démarche systématique qu’il implique peuvent être utiles pour compenser un oubli ou une erreur d’interprétation.

Toutefois, chaque algorithme possède des limites. La limite essentielle est que le raisonnement diagnostique tient en réalité compte de beaucoup plus d’éléments qu’il n’est possible d’intégrer dans un algorithme. La principale limite pratique de l’utilisation d’un algorithme résulte de leur construction : en effet, un algorithme propose une démarche qui repose sur une suite de questions qui s’enchaînent. De fait, si la réponse à une question est fausse, toute la suite le sera. Il faut donc être particulièrement vigilant dans les embranchements de l’algorithme et ne pas hésiter à les revoir lorsqu’on ne débouche pas sur des diagnostics différentiels cohérents. De même, parfois plusieurs réponses sont possibles — ou on hésite simplement entre deux réponses — et, dans ce cas, il est utile de formuler les diagnostics différentiels qui résultent des deux possibilités. Par ailleurs, il existe évidemment des redondances — inévitables — dans les différentes catégories diagnostiques, car une même maladie peut se manifester par différentes lésions élémentaires. Néanmoins, seule cette redondance permet de proposer un outil utile pour la pratique.

Au bout, il reste toujours une liste de plusieurs maladies parmi lesquelles le clinicien devra choisir. Cette dernière étape du diagnostic ne pourra être franchie que par l’expérience clinique ou le recours à certains examens complémentaires, notamment la biopsie cutanée. C’est au plus tard à cette étape aussi qu’il faut quitter l’algorithme pour recourir au raisonnement clinique qui tient compte non seulement de la lésion cutanée, mais également de l’impression générale et du profil du malade, des données de l’interrogatoire, du terrain (âge, sexe, antécédents, etc.), des autres signes cliniques ainsi que de la séméiologie fine des lésions identifiées. Ce sont ainsi par exemple la fièvre vespérale et les arthralgies qui permettront de rattacher une éruption érythémateuse fugace à une maladie de Still ou c’est la notion de contact de la peau avec un acide qui permettra d’identifier la cause d’une ulcération. Ailleurs, par exemple parmi les lésions palpables, c’est l’aspect blanc porcelainé d’une papule, un peu déprimée au centre et avec une bordure télangiectasique, qui permettra de reconnaître une maladie de Köhlmeier-Degos, alors que c’est la couleur pourpre d’une papule polygonale, plane, prurigineuse recouverte d’un très fin réseau kératosique blanchâtre qui permettra de poser le diagnostic de lichen.

Quoi qu’il en soit, il est bon de sortir de l’algorithme dès que l’on a acquis une connaissance et une pratique suffisantes. Le raisonnement diagnostique, faisant appel à beaucoup plus d’éléments que les quelques questions de l’algorithme, doit alors reprendre le dessus.

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