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Recommandations pour la pratique chirurgicale - 29/05/12

Doi : 10.1016/B978-2-294-02095-7.50029-9 

Un certain nombre de recommandations générales doivent être faites pour tous les actes de chirurgie en gynécologie-obstétrique. Elles concernent l’utilisation de la check-list recommandée par la Haute Autorité de Santé (HAS, 2009), l’antibioprophylaxie, la prévention des accidents thrombo-emboliques et les accidents d’exposition au sang.

Utilisation de la check-list

Différentes études ont bien montré que l’utilisation d’une check-list au bloc opératoire fait baisser la mortalité et la morbidité liées à l’acte d’anesthésie et de chirurgie. L’HAS avec les différents collèges de chirurgie dont le CNGOF et la SEGP viennent donc de faire des recommandations et de proposer une fiche que vous trouverez ci-dessous.

Cette liste doit être utilisée par toute l’équipe du bloc : infirmières de bloc, infirmières anesthésistes, anesthésistes, chirurgiens, avant l’anesthésie, pendant l’intervention et après.

Avant l’intervention, elle concerne l’identité du malade, le type d’intervention et le côté à opérer. La répétition de la vérification des ces éléments par les personnels de bloc, l’anesthésiste et le chirurgien paraîtra à certains fastidieuse, mais elle est impérative pour améliorer la sécurité du patient.

L’anesthésie faite, c’est au chirurgien de vérifier une dernière fois le dossier, le côté de l’intervention et d’annoncer à l’anesthésiste les risques, en particulier hémorragiques, auxquels il peut avoir à faire face. C’est à l’opérateur de s’assurer que l’antibioprophylaxie éventuelle a bien été faite.

En postopératoire, s’il appartient aux infirmières de bloc de vérifier le nombre de champs, de compresses, de pinces et d’aiguilles, c’est au chirurgien et à l’anesthésiste qu’il revient de faire les consignes postopératoires écrites : anticoagulants, sondes, etc. C’est à l’opérateur de faire immédiatement son compte rendu opératoire en y faisant figurer les complications éventuelles, et c’est au chirurgien de remplir le bon d’examen anatomopathologique en s’assurant du bon étiquetage des pièces.

Bien entendu, cette check-list dûment remplie restera dans le dossier et sera demandée en cas de litige

Tout ce qui est dit sur ces fiches paraîtra à beaucoup évident, de bon sens. En fait (et on le voit bien dans les expertises), tout cela n’est pas toujours fait pour de multiples raisons. Cette check-list peut bien sûr être complétée mais elle ne peut en aucun cas être abrégée.

C’est à son utilisation systématique et répétitive que nous appelons tous les intervenants dans les blocs opératoires. Il en va de la sécurité des patientes.

Check-list proposée par l’HAS

Cette check-list n’est pas modifiable mais peut faire l’objet d’un développement complémentaire spécifique.

Antibioprophylaxie au cours des interventions chirurgicales en gynécologie-obstétrique (Tableau I et Tableau II)

L’efficacité de l’antibioprophylaxie chirurgicale est bien démontrée et a fait l’objet de recommandations de l’ANDEM, de l’AGOG et de la SFAR. En gynécologie-obstétrique, l’antibioprophylaxie est recommandée (NP1) dans :

les hystérectomies abdominales et vaginales ;
la chirurgie des prolapsus ;
les césariennes ;
les mastectomies et la chirurgie de reconstruction des seins ;
les IVG chirurgicales.

Les antibiotiques ne sont pas recommandés dans :

les cœlioscopies ;
les hystéroscopies diagnostiques ou opératoires ;
la pose de stérilets ;
les biopsies d’endomètre ;
les épreuves urodynamiques.


Identification du patientÉtiquette du patient ou nom, prénom, date de naissanceCHECK-LIST SECURITE DU PATIENT AU BLOC OPERATOIREVersion 2010-01Salle : …………………………………………………..Date d’intervention : ……………………………Heure d’intervention (début) : …………Chirurgien « intervenant » : ……………………………………………………………….Anesthésiste « intervenant » : ……………………………………………………………….Coordonnateur check-list : ……………………………………………………………….

Identification du patient
Étiquette du patient ou nom, prénom, date de naissance 
CHECK-LIST SECURITE DU PATIENT AU BLOC OPERATOIRE
Version 2010-01 
 
  
Salle : …………………………………………………..
Date d’intervention : ……………………………
Heure d’intervention (début) : ………… 
Chirurgien « intervenant » : ……………………………………………………………….
Anesthésiste « intervenant » : ……………………………………………………………….
Coordonnateur check-list : ………………………………………………………………. 

AVANT INDUCTION ANESTHÉSIQUETemps de pause avant anesthésieAVANT INTERVENTION CHIRURGICALETemps de pause avant incisionAPRÈS INTERVENTIONPause avant sortie de salle d’opération1Identité du patient :– le patient a décliné son nom, sinon, par défaut, autre moyen de vérification de son identité□ Oui□ Non6Vérification « ultime » croisée au sein de l’équipe :– identité patient correcte– intervention prévue confirmée– site opératoire correct– installation correcte– documents nécessaires disponibles□ Oui□ Oui□ Oui□ Oui□ Oui□ Non□ Non□ Non□ Non□ N/A9Confirmation orale par le personnel auprès de l’équipe :– de l’intervention enregistrée– du compte final correct des compresses, aiguilles, instruments, etc.– de l’étiquetage des prélèvements, pièces opératoires, etc.– du signalementde dysfonctionnements matériels et des événements indésirables□Oui□ Oui□ Oui□ Oui□ Non□ Non□ Non□ Non2L’intervention et site opératoire sont confirmés :– idéalement par le patient et, dans tous les cas, par le dossier ou procédure spécifique– la documentation clinique et paraclinique nécessaire est disponible en salle□ Oui□ Oui□ Non□ Non7Partage des informations essentielles dans l’équipe sur des éléments à risque/points critiques de l’intervention :3Le mode d’installation est connu de l’équipe en salle, cohérent avec le site/intervention et non dangereuse pour le patient□ Oui□ N/A– sur le plan chirurgical (temps opératoire difficile, points spécifiques de l’intervention, etc.)□ Oui□ Non10Les prescriptions pour les suites opératoires immédiates sont faites de manière conjointe□ Oui□ Non□ N/A4Le matériel nécessaire pour l’intervention est vérifié :– pour la partie chirurgicale– pour la partie anesthésique□ Oui□ Oui□ Non□ Non– sur le plan anesthésique (risques potentiels liés au terrain ou à des traitements éventuellement maintenus)□ Oui□ NonEn cas d’écart avec la check-list, préciser la décision choisie5Vérification croisée par l’équipe de points critiques et des mesures adéquates à prendre :– allergie du patient– risque d’inhalation, de difficultè d’intubation ou de ventilation au masque– risque de saignement important□ Oui□ Oui□ Oui□ Non□ Non□ Non8Antibioprophylaxie effectuée□ Oui□ Non□ N/RAbréviations utilisées : CIL : check-list – N/A : non applicable – N/R : non recommandé

Les règles d’administration sont simples mais malheureusement souvent mal appliquées et respectées dans moins de 20 % des cas. Elles doivent donc être rappelées :

injection intraveineuse 1 à 2 heures avant l’incision cutanée ou lors de l’induction anesthésique ;
posologie adéquate ;
refaire la dose unitaire toutes les 4 heures de façon à maintenir des concentrations tissulaires efficaces ;
durée limitée à celle de l’acte opératoire, parfois 24 heures mais ne dépassant jamais 48 heures.

Nous donnons dans le Tableau II les recommandations de la SFAR 1999 pour la prévention des endocardites.

La prévention des adhérences intrapéritonéales

La prévention des adhérences postopératoires intéresse toutes les spécialités chirurgicales. En chirurgie gynécologique, leur apparition peut être source d’infertilité, de douleurs ou des deux. Plusieurs approches ont été proposées pour en prévenir ou en minimiser la survenue.

Les techniques chirurgicales de la microchirurgie – manipulation douce et si possible atraumatique des tissus, hémostase précise, utilisation de sutures entraînant peu de réactions inflammatoires, usage minimal de l’électrochirurgie, irrigation des tissus – ont été proposées sans que des études randomisées n’aient démontré réellement leur efficacité. Une chirurgie peu traumatique, une hémostase soigneuse et le lavage de la cavité péritonéale au sérum physiologique tiède sont cependant recommandés.

L’utilisation de la laparoscopie est sans doute moins adhésiogène que la laparotomie. Il n’y a cependant pas de travaux randomisés chez l’homme pour le démontrer. Cependant, lors du traitement de la grossesse extra-utérine par cœlio- ou microchirurgie avec laparotomie, il a été démontré qu’il y avait dans 50 % des cas des adhérences postopératoires contre 15 % en cœliochirurgie (Lundorff et al., 2001). Johns, 2001 conclut d’une revue sur le sujet que la chirurgie mini-invasive n’est moins adhésiogène qu’en « théorie ».

La mise en place de lambeau de péritoine ou d’épiploon sur des zones cruentées est très adhésiogène chez l’animal et a été abandonnée chez l’homme. De même, il a été démontré chez l’animal que le fait de suturer les brèches péritonéales est inefficace du fait des réactions inflammatoires dues au fil et aux perturbations de la vascularisation péritonéale liées à de la tension. Chez l’homme, la non-péritonisation ne change pas les suites opératoires (fièvre, reprise du transit durée postopératoire) mais les données sont insuffisantes concernant la formation des adhérences et leurs conséquences dans le long terme, car 5,7 % des patients seront dans les dix ans réhospitalisés pour un problème lié aux adhérences postopératoires. On ne peut donc aujourd’hui dire que le fait de ne pas péritoniser soit mieux que l’inverse, et vice versa (Wilkinson et Enkin, 1998, Cheong et al., 2001).

Des tissus artificiels ont été proposés :

la cellulose (Interceed) qui semble efficace pour diminuer les adhérences (treize essais NP1) à condition qu’il n’y ait pas de sang au contact et que le matériel recouvre tout le défect péritonéal ;
la carboxyméthyl cellulose, l’acide hyaluronique (Seprafilm) et le Gore Tex réduisent également l’importance des adhérences et leur gravité (Np1). L’inconvénient de ces matériaux est qu’ils sont difficiles à utiliser correctement en cœlioscopie et la Food an Drug Administration (FDA) n’en conseille pas l’usage par laparoscopie. Ils peuvent être utilisés en laparotomie, en particulier après les myomectomies.

Des liquides sont proposés pour produire une hydroflottation qui éviterait l’accolement des zones cruentées et la formation des adhérences. Le Ringer lactate (500ml à 3l) est rapidement absorbé et n’a pas fait la preuve de son efficacité. Le dextran 70 (Hyskon), une forme liquide de carboxyméthyl cellulose et d’acide hyaluronique (HAL-C) l’icodextrine (Adept®) ou l’acide hyaluronique (Intergel®) ont été proposés (Di Zerega et al., 2002, Keyport 2001). S’ils diminuent plus ou moins l’importance des adhérences, aucun de ces produits n’est recommandé par la FDA.

Intergel® a été retiré en 2003 en raison de douleurs postopératoires.

Enfin, un traitement par corticoïdes a été proposé : 2mg la veille de l’intervention suivi de 8mg trois fois par jour à J0 et J1 et 2mg de J2 à J6 (Querleu et al., 1989). Certains enfin associent une ligamentopexie pour éviter l’accolement de la face postérieure de l’utérus avec le rectum.

Quoi qu’il en soit, si le bon sens indique que le mieux est d’avoir le moins d’adhérences postopératoires possible, la question est de savoir la signification clinique de la diminution de celles-ci : une seule adhérence mal placée peut avoir des conséquences catastrophiques, alors que de nombreuses adhérences denses peuvent n’en pas avoir (Johns, 2001). Aucune donnée sur les implications cliniques (douleurs, occlusions, infertilité) de l’efficacité de ces produits n’a été rapportée.

La prévention des phlébites et des embolies pulmonaires

Les accidents thrombo-emboliques sont une des principales causes de mortalité et de morbidité de la chirurgie gynécologique. La fréquence des phlébites varierait de 7 à 29 % après une chirurgie gynécologique et monterait à 45 % en cas de cancer. La fréquence des embolies pulmonaires varie de 0,1 à 5 % selon le niveau de risque (ACOG, 2000).

La majorité des accidents survient dans la semaine postopératoire même si la patiente reste à risque pendant trois semaines après sa sortie, surtout si elle est à mobilité réduite.

La prévention est donc essentielle ; pour cela, on classe les patients en fonction de leurs facteurs de risque (Tableau III).

Quelles mesures avant l’intervention ?

L’arrêt de la contraception orale n’est intéressant que s’il est fait 4 à 6 semaines avant l’intervention (le risque de phlébite passe de 0,96 à 0,5 %). Il doit être mis en balance avec le risque de grossesse qui augmente plus que la pilule le risque thrombo-embolique.

L’arrêt du traitement hormonal substitutif (THS) n’a pas fait la preuve de son intérêt.

Il est souhaitable de rechercher la mutation du facteur V Leiden chez les patientes qui ont des antécédents thrombo-emboliques et qui sont de race blanche de type caucasien.

Quelle prévention ?

Nous rapportons ci-dessous les recommandations de la SFAR de 2005 revues en 2010.

Efficacité et risques des stratégies de préventionMoyens mécaniques seuls (déambulation précoce, compression)

Les moyens prophylactiques mécaniques sont utiles pour réduire le risque thrombo-embolique postopératoire en chirurgie gynécologique.

Les moyens mécaniques représentent une alternative de premier choix en cas de risque hémorragique contre-indiquant un traitement anticoagulant médicamenteux (grade A).

Les moyens mécaniques, qui présentent plutôt des inconvénients liés à leur utilisation que des contre-indications, constituent un traitement adjuvant efficace aux traitements médicamenteux (grade D).

Héparines

L’héparine non fractionnée (HNF) réduit le risque de thrombose veineuse profonde avec un nombre de sujet à traiter de 11 (niveau 1) mais est associée à une augmentation significative du nombre d’hématomes au point d’injection.

Comparées à l’héparine non fractionnée, les héparines de bas poids moléculaires (HBPM) ne démontrent aucune différence significative en termes d’efficacité, ni en termes d’effets secondaires (saignement, transfusion) (niveau 1). Compte tenu de leur facilité d’emploi, les HBPM sont considérées comme le traitement prophylactique de référence en chirurgie gynécologique (grade A).

Antivitamines K

Les AVK font preuve d’une efficacité significative et ce en chirurgie bénigne ou carcinologique avec un NNT de 6 (niveau 1). Aucune différence significative entre AVK et HNF n’a été observée en termes d’efficacité et de risque hémorragique postopératoire (niveau 1).

Autres anticoagulants

Les autres médicaments antithrombotiques (hirudine, danaparoïde, fondaparinux, mélagatran/ximélagatran) n’ont jamais été évalués en chirurgie gynécologique.

Divers

L’efficacité de l’aspirine seule n’a jamais été évaluée en chirurgie gynécologique contre placebo ou contre HNF ou HBPM.

Associations

L’association de médicaments et de moyens mécaniques n’a jamais été évaluée.

Quand et pendant combien de temps ces stratégies doivent-elles être prescrites ?Début de la prophylaxie

La contention veineuse élastique doit être mise en place en période pré-opératoire, puis maintenue en périodes per- et postopératoires jusqu’à déambulation (grade D).

Si l’utilisation de la compression pneumatique intermittente est retenue, elle doit être maintenue pendant les 5 premiers jours postopératoires (grade B).

Les traitements anticoagulants testés dans les études citées plus haut sont administrés le plus souvent de 12 à 2 heures avant l’intervention chirurgicale (niveau 1). Aucune étude n’a comparé l’efficacité du traitement héparinique (HNF ou HBPM) débuté avant ou après l’intervention.

Une numération plaquettaire doit être effectuée avant la mise en route du traitement anticoagulant.

Il n’est pas recommandé d’effectuer un dosage systématique de l’activité anti-Xa, de l’héparinémie, ni d’effectuer un TCA lors de la prophylaxie par HBPM (grade D).

Durée de la prophylaxie

La durée habituelle est de 7 à 14 jours en cas de chirurgie à risque modéré (grade D) et de 4 semaines en cas de risque élevé (grade A).

La chirurgie ambulatoire modifie-t-elle le risque et les stratégies ?

Pour l’immense majorité des patientes bénéficiant d’un acte de chirurgie gynécologique ambulatoire, aucune mesure de prophylaxie anticoagulante autre que la déambulation précoce n’est à préconiser (grade D).

Néanmoins, l’identification de facteurs de risque thrombotique doit conduire à la prescription de bas de contention et/ou d’une héparine (grade D).

Prescription des traitements préventifs des accidents thrombo-emboliques en chirurgie gynécologique

Les indications des traitements préventifs des accidents thrombo-emboliques en chirurgie gynécologique sont résumées dans le Tableau IV.

Les femmes à bas risque (Tableau IV) n’ont pas besoin d’anticoagulants si elles ont une mobilité normale.

Les femmes à risque modéré doivent avoir :

des bas à varices ;
une dose d’héparine de bas poids moléculaire : daltéparine (Fragmine®) 2 500UI = 0,2ml ou nadroparine (Fraxiparine®) 1 900UI = 0,2ml ou énoxaparine (Lovenox®) 2 000UI = 0,2ml une fois par jour à commencer l’après-midi de l’intervention ou héparine calcique (Calciparine®) 5 000UI = 0,22ml toutes les 12 heures ;
les femmes à haut risque doivent être mises à l’héparine 5 000UI toutes les 8 heures. On peut aussi utiliser la nadroparine (Fraxiparine®) 3 800UI = 0,4ml, la daltéparine (Fragmine ) 5 000UI = 0,2ml ou de l’énoxaparine (Lovenox®) 4 000UI = 0,4ml une fois par jour.

Le traitement anti coagulant sera poursuivi jusqu’à déambulation active et complète du patient et, en général, pendant 10 jours.

La numération des plaquettes doit être faite avant le traitement, puis deux fois par semaine. Toute baisse de 30 à 50 % de la valeur initiale de la numération plaquettaire doit donner l’alerte et être vérifiée. Si la baisse est confirmée il faut arrêter le traitement héparinique et passer aux anticoagulants oraux si la prévention est encore nécessaire. Cette thrombopénie sous héparine contre-indique une nouvelle utilisation de l’héparine.

Incidence sans prophylaxie des événements thrombo-emboliques cliniques et paracliniques en obstétrique. Classement par niveau de risqueIncidence naturelle des événements thrombo-emboliquesAu cours de la grossesse et en post-partum

La fréquence de la maladie thrombo-embolique veineuse (MTEV) en obstétrique est difficile à déterminer et les incidences suggérées ci-dessous restent sujettes à caution. En France, on recense cinq à dix décès maternels par an (6 à 12/1 000 000 naissances) liés à une embolie pulmonaire et, dans un tiers des cas, les soins sont non optimaux.

L’incidence globale de la MTEV en obstétrique semble avoir diminué au cours des dernières décennies. Les études récentes suggèrent globalement une incidence inférieure ou égale à 1/1 000. Les thromboses veineuses profondes surviennent plutôt en pré-partum, alors que la période du post-partum est plutôt associée à la survenue d’embolie pulmonaire. En cours de grossesse, la survenue prédominante de la MTEV pendant le troisième trimestre est incertaine, plusieurs travaux indiquant une répartition homogène au cours des trois trimestres, d’autres encore suggérant une incidence supérieure en début de grossesse. Les thromboses veineuses profondes des membres inférieurs surviennent environ six à sept fois plus souvent à gauche qu’à droite.

Après césarienne

Globalement, la césarienne multiplie le risque de survenue de MTEV par un facteur de deux à cinq. La césarienne élective représente cependant une intervention à faible risque thrombo-embolique.

Facteurs de risque et classification en niveaux de risque

La grossesse représente en elle-même un facteur de risque de telle sorte que le risque de MTEV en obstétrique est cinq fois plus important que dans la population générale.

Facteurs individuels antérieurs à la grossesse

De nombreux facteurs de risque cliniques ou biologiques ont été identifiés selon des méthodologies ayant une validité très variable et exercent un rôle aggravant mineur (âge, tabagisme, obésité, groupe sanguin non-O), important (antécédent cardiaque) ou imprécis (antécédents de phlébite superficielle).

Les antécédents personnels de MTEV augmentent le risque de récidive avec une incidence d’événements cliniques estimés entre 0 et 20 %. De même, des antécédents familiaux de MTEV augmenteraient le risque dans une proportion similaire. Cette incidence, très variable, pourrait être influencée par au moins deux facteurs intriqués : l’existence d’anomalies biologiques thrombophiliques et le caractère temporaire (ou non) de la présence d’un facteur de risque lors d’un premier événement thrombo-embolique. Il est admis qu’en cas de présence d’un facteur temporaire de risque thrombo-embolique lors de l’épisode antérieur, le risque de récidive est moins important qu’en présence d’un facteur de risque permanent.

Les relations entre la thrombophilie constitutionnelle ou acquise et la grossesse ont donné lieu à une conférence de consensus française récente. Schématiquement, la prévalence de la MTEV et l’excès de risque associés à ces pathologies constitutionnelles sont résumés dans les Tableau V et Tableau VI.

La mutation homozygote MTHFR n’est pas associée à un risque significatif de MTEV en cours de grossesse, notamment en cas de supplémentation en acide folique.

Parmi les déficits acquis, le plus fréquent est le syndrome des anticorps antiphospholipides dont la prévalence est de l’ordre de 0,5 à 1/1 000. Le risque relatif de MTEV maternelle est élevé, probablement proche de celui associé au déficit en antithrombine, et justifie une attitude thérapeutique similaire.

Facteurs liés à la grossesse

Le rôle de ces facteurs (parité, grossesses multiples, immobilisation stricte, pré-éclampsie, suppression de la lactation en post-partum, thrombocytose post-césarienne, hémorragie/anémie et transfusion) est diversement apprécié, suggérant un risque faible. Les séries n’ont pas montré de relation entre la survenue de MTEV obstétricale et le taux de D-dimères ou de complexes thrombine-antithrombine.

Quelle est l’efficacité et quels sont les risques des stratégies de prévention ?Moyens mécaniquesBas de contention

Ils peuvent être employés seuls dans les groupes à risque faible et en association en cas de risque plus élevé (grade D).

Filtres caves temporaires

Ils ont été proposés en cours de grossesse en cas de thrombose veineuse profonde avec contre-indication aux anticoagulants ou de thrombose étendue récente à haut risque emboligène en péripartum (grade D).

Héparine non fractionnée et héparines de bas poids moléculaire

Peu d’études ont comparé héparine non fractionnée (HNF) et héparines de bas poids moléculaire (HBPM) et suggèrent une efficacité identique (niveau 2). L’HNF ne passe pas la barrière placentaire et peut donc être utilisée à tous les termes de la grossesse (niveau 2).Les HBPM qui ont été étudiées (daltéparine et énoxaparine) ne traversent pas la barrière placentaire aux deuxième et troisième trimestres et n’augmentent pas le risque de malformations ou d’hémorragie néonatale (niveau 2). L’HNF et les HBPM ne modifient pas le cours de la grossesse et la fréquence accrue de prématurité semble plutôt liée au terrain sur lequel elles sont prescrites (niveau 2). Les accidents hémorragiques maternels sont plus fréquents qu’en l’absence de traitement (niveau 2) et l’HNF semble plus fréquemment responsable d’hémorragie que les HBPM (niveau 3). De même, le risque d’ostéoporose associé à un traitement prolongé est plus fréquent et plus sévère lors d’un traitement par HNF lors d’études comparatives avec les HBPM (niveau 2). Au cours de la grossesse, l’incidence de la thrombopénie induite par héparine (TIH) serait plus élevée avec l’HNF (niveau 2) et le risque serait inférieur à 1 % avec les HBPM (niveau 4).

La posologie des HBPM doit être adaptée au poids et/ ou à l’activité anti-Xa (grade D).

Antivitamines K

Les AVK passent la barrière placentaire et produisent une embryopathie typique lorsqu’elles sont administrées entre 6 et 12 semaines d’aménorrhée (niveau 2). Un risque hémorragique fœtal accru existe lorsque (SFAR, 2005) les AVK sont utilisées plus tardivement au cours de la grossesse (niveau 2). La warfarine ne passe pas dans le lait maternel et peut être utilisée en post-partum (niveau 2). Le risque hémorragique maternel est également accru (niveau 2).

Fondaparinux et ximélagatran

Il n’existe aucune étude clinique ayant documenté l’emploi de ces molécules en obstétrique. Cependant, le fondaparinux ne traverse pas la barrière placentaire selon une étude expérimentale (niveau 4).

Quand et combien de temps ces stratégies prophylactiques doivent-elles être prescrites ?

Les indications et les durées de traitement sont décrites dans le Tableau VIII en fonction des situations cliniques et des niveaux de risque (grade D).

Toutes ces recommandations sont fondées sur de faibles niveaux de preuve (niveau 4).

En cas de contamination peropératoire avec un patient VIH+

Les recommandations ont été publiées par Antona et al., 1993 et actualisées par l’arrêté du 1er août 2007 et Prise en charge médicale des personnes infectées par le VIH, 2008.

Nettoyage de la plaie

Nettoyer immédiatement la plaie à l’eau courante et au savon pour éliminer toute présence de sang ; puis désinfecter pendant au moins 5 minutes à l’aide de Dakin, d’eau de Javel 9° chlorométrique diluée au 1/5e ou, à défaut, de polyvidone iodée ou d’alcool à 70°. Si la projection est dans les yeux, faire un rinçage immédiat et prolongé au sérum physiologique ou à l’eau pendant au moins 5 minutes.


Tableau VIIIndication et durée des stratégies prophylactiques des événements thrombo-emboliques en obstétrique.Pendant la grossessePost-partum et après césarienneRisque faiblePas de traitement anticoagulant pendant la grossessePas de traitement anticoagulant systématique de la grossesse en post-partum Bas antithromboseRisque modéréPas de traitement anticoagulant systématique pendant la grossesse Bas antithromboseTraitement préventif par HBPM à dose forte (énoxaparine 4 000Ul/j ou daltéparine 5 000Ul/j) pendant 6 à 8 semaines. La dose peut être réduite et la durée plus courte lorsque le risque est moins important (par exemple, césarienne en urgence sans autre facteur de risque associé : énoxaparine 20mg ou daltéparine 2 500U pendant 7 à 14 jours) Bas antithromboseRisque élevéTraitement préventif à forte dose (énoxaparine 4 000Ul/j ou daltéparine 5 000Ul/j) ou à dose intermédiaire (énoxaparine 4 000Ul deux fois par jour ou daltéparine 5 000Ul deux fois jour) au troisième trimestre, voire tout au long de la grossesse* Bas antithromboseTraitement préventif à forte dose (énoxaparine 4 000Ul/j ou daltéparine 5 000Ul/j) pendant 6 à 8 semaines après l’accouchement Bas antithromboseRisque majeurTraitement curatif par HNF au premier trimestre, puis par HBPM (ajusté sur le poids ou à l’anti-Xa) aux deuxième et troisième trimestres Bas antithromboseAVK durant 3 mois au minimum Bas antithrombose*En cas de syndrome des anticorps antiphospholipides (SAPL) symptomatique, il est souvent recommandé d’associer un traitement par faible dose d’aspirine pendant la grossesse.

Tableau VII - Indication et durée des stratégies prophylactiques des événements thrombo-emboliques en obstétrique.
 Pendant la grossesse Post-partum et après césarienne 
Risque faible Pas de traitement anticoagulant pendant la grossesse Pas de traitement anticoagulant systématique de la grossesse en post-partum
Bas antithrombose 
Risque modéré Pas de traitement anticoagulant systématique pendant la grossesse
Bas antithrombose 
Traitement préventif par HBPM à dose forte (énoxaparine 4 000Ul/j ou daltéparine 5 000Ul/j) pendant 6 à 8 semaines. La dose peut être réduite et la durée plus courte lorsque le risque est moins important (par exemple, césarienne en urgence sans autre facteur de risque associé : énoxaparine 20mg ou daltéparine 2 500U pendant 7 à 14 jours)
Bas antithrombose 
Risque élevé Traitement préventif à forte dose (énoxaparine 4 000Ul/j ou daltéparine 5 000Ul/j) ou à dose intermédiaire (énoxaparine 4 000Ul deux fois par jour ou daltéparine 5 000Ul deux fois jour) au troisième trimestre, voire tout au long de la grossesse*
Bas antithrombose 
Traitement préventif à forte dose (énoxaparine 4 000Ul/j ou daltéparine 5 000Ul/j) pendant 6 à 8 semaines après l’accouchement
Bas antithrombose 
Risque majeur Traitement curatif par HNF au premier trimestre, puis par HBPM (ajusté sur le poids ou à l’anti-Xa) aux deuxième et troisième trimestres
Bas antithrombose 
AVK durant 3 mois au minimum
Bas antithrombose 

[*]  En cas de syndrome des anticorps antiphospholipides (SAPL) symptomatique, il est souvent recommandé d’associer un traitement par faible dose d’aspirine pendant la grossesse.

Évaluer le risque de transmission infectieux

Déterminer l’heure et la date de la blessure, la profondeur de celle-ci et le type de matériel en cause.

Obtenir le statut sérologique du patient source avec son accord et en cas de positivité VIH préciser le stade clinique, les traitements antérieurs et en cours, la charge virale VIH et le taux de lymphocytes CD4 ; en cas de positivité VHC, faire une recherche d’ARN-VHC ; recherche d’Ag HBs pour le risque VHB.

L’estimation du risque peut être faite par le médecin référent de l’établissement ou le médecin du travail, en liaison avec l’équipe clinique qui a en charge le patient source.

Dès l’exposition, il faut faire une sérologie VIH, mais aussi VHB et VHC, le plus tôt possible et au plus tard au 8e jour après l’accident, ainsi que les examens suivants : NFS, ALAT et test sanguin de grossesse.

Le traitement antirétroviral sera prescrit le plus rapidement possible, au mieux dans les 4 heures après l’accident et au plus tard jusqu’à 48 heures. Ce traitement d’urgence est donné pour les 72 premières heures :

si le sujet source est infecté par le VIH ;
s’il existe un ou des facteurs de risque de fortement suspecter une infection par le VIH.

Dans les autres cas, elle sera discutée (Tableau VIII).

Le traitement antirétroviral de première intention recommandé associe d’une part le Combivir® (association de zidovudine et de lamivudine), un comprimé matin et soir en cours de repas, ou le Truvada® (association de ténofovir et d’emtricitabine), un comprimé par jour en cours de repas, à d’autre part du Kaletra® (lopinavir/ritonavir), deux comprimés matin et soir.

Si le sujet source reçoit déjà un traitement antirétroviral, la prescription initiale pourra être différente de celle prévue dans la trousse de traitement du service d’urgence et devra être discutée avec un des médecins du service référent.

En cas de contamination VHC avérée (ARN-VHC ou sérologie) du sujet source, un avis spécialisé doit être rapidement demandé pour le suivi.

Des trousses de prophylaxie contenant des quantités suffisantes de traitement pour les 72 premières heures sont disponibles dans tous les services d’urgences des hôpitaux ouverts 24 heures sur 24. Ces trousses sont à la disposition de tous les professionnels de santé des établissements hospitaliers publics ou privés ou exerçant en libéral.

Après l’accident il faut aussi :

faire une déclaration dans les 24 heures pour les établissements de droit privé et dans les 48 heures pour les établissements de droit public ;
assurer un suivi clinique et sérologique du blessé par le service de médecine du travail et par un médecin référent en cas de traitement : confirmation de la poursuite éventuelle et surveillance du traitement antirétroviral pour une durée totale de 4 semaines ; les sérologies VIH seront faites soit au premier et troisième mois à compter de la date de l’accident lorsque la personne n’est pas mise sous traitement prophylactique (contrôle sérologique au premier, au troisième et au sixième mois du VHC et ALAT si risque VHC), soit au deuxième et quatrième mois à compter de cette date si elle bénéficie d’un traitement (contrôle sérologique au premier, au quatrième et au sixième mois du VHC et ALAT si risque VHC). Les cas de contamination professionnelle sont devenus exceptionnels. Le risque de séroconversion VIH est estimé à 0,32 % après une exposition percutanée. Il est dix fois plus faible après exposition cutanéo-muqueuse. En France, 14 cas de séroconversion ont été documentés et 34 infections présumées ont été recensées fin 2007 ;
expliquer et prescrire une contraception mécanique pendant 3 mois (ou 4 mois si traitement) et s’exclure du don du sang pendant la même durée.

En cas de séropositivité VIH, les chirurgiens doivent impérativement arrêter définitivement d’opérer de peur de contaminer les malades. Une réorientation professionnelle doit être envisagée. En cas de contamination par VHC, le chirurgien doit cesser toute activité opératoire pendant la période de réplication virale, c’est-à-dire lorsque l’ARN du VHC est présent dans le sang ou si une élévation des transaminases est constatée (CNOM 1997).



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