Le Secteur de psychiatrie générale constitue la base de l'organisation du service public de psychiatrie. Il est né d'abord d'une réaction très forte de certains psychiatres juste après la guerre de 1939-1945 contre l'enfermement et la notion de ghetto. Il résulte aussi du mouvement de psychothérapie institutionnelle, de la pénétration des théories psychanalytiques dans le champ de la psychiatrie, des conséquences des réflexions du philosophe Michel Foucault sur le grand renfermement, mais aussi de la découverte en 1954 du premier neuroleptique, le Largactil^®, qui a permis de faire sortir des murs de l'asile de nombreux malades mentaux. L'idée du Secteur était qu'une même équipe composée de psychiatres, d'internes, de psychologues, d'assistants sociaux, d'infirmiers de secteur psychiatrique, d'aides-soignants, de secrétaires, placés sous l'autorité d'un médecin chef de secteur, suivait le même malade dans l'intra- comme dans l'extrahospitalier. Peu à peu, après les trente glorieuses, le Secteur issu d'une conception du soin aux psychotiques est devenu une aire de planification sanitaire, puis un concept économique, dont le pôle d'activité prévu par le plan hôpital 2007 semble être l'ultime dérive d'un glissement sémantique dont peu de psychiatres se sont aperçus. Dans cette étude, nous souhaiterions évoquer la préhistoire du Secteur et la philosophie des soins qui la sous-tend, puis la légalisation du Secteur et les relations parfois difficiles entre la psychiatrie et les urgences, la psychiatrie et les réseaux pour ouvrir sur une idée de conclusion provisoire : la croisée des chemins entre, d'un côté la nouvelle gouvernance, et de l'autre le plan psychiatrie et santé mentale.