La tularémie, une autre étiologie des granulomatoses - 23/11/17
Résumé |
Introduction |
La tularémie, zoonose due à Francisella tularensis, rare en France, peut prendre différentes formes cliniques, notamment celle d’une altération fébrile subaiguë de l’état général. La plus fréquente reste cependant la forme locale ulcéroganglionnaire. Les tissus atteints peuvent être le siège d’une inflammation granulomateuse. La confirmation diagnostique est du ressort de la microbiologie directe (cultures classiques ou biologie moléculaire) ou indirecte (sérologie).
Nous présentons 4 cas différents de tularémie illustrant ce polymorphisme tant clinique que paraclinique.
Observation |
Cas no 1 : homme de 80 ans hospitalisé pour diarrhées aiguës fébriles. Les hémocultures sont positives à F. tularensis subsp. holartica. L’interrogatoire n’identifie pas de contact avec des lagomorphes mais avec du foin proche d’une rivière.
Cas no 2 : homme de 75 ans pris en charge pour une pneumopathie aiguë. Les hémocultures sont positives à F. tularensis subsp. holartica. Il avait ingéré 5jours auparavant de l’eau de rivière (la même que dans le cas no 1).
Cas no 3 : femme de 67 ans adressée pour une altération fébrile de l’état général. Le scanner identifie des adénopathies médiastinales et un nodule pulmonaire. L’histologie ganglionnaire conclue à un granulome épithélioïde gigantocellulaire avec nécrose caséeuse. La sérologie tularémie et la PCR sur ganglion sont positives. La reprise de l’interrogatoire authentifie un contact avec des lapins sauvages quelques semaines auparavant.
Cas no 4 : homme de 40 ans, éleveur d’alpagas, présentant une altération fébrile de l’état général. Le scanner visualise des adénopathies médiastinales et un nodule pulmonaire. L’histologie ganglionnaire révèle une adénite suppurée avec du granulome épithélioïde par endroit. La sérologie et la PCR sur le ganglion sont positives.
Conclusion |
Parmi ces quatre cas, on identifie deux modes de transmission (ingestion ou inhalation de particules provenant d’une eau contaminée et probable transmission directe depuis le lagomorphe) et deux présentations cliniques, différentes de la forme classique ulcéroganglionnaire (typhoïdique aiguë et médiastinopulmonaire subaiguë pseudo lymphomateuse). Dans les formes typhoïdiques, le diagnostic est fourni par la positivité des hémocultures révélant, de façon retardée, autour de J5, un BGN. Dans les formes subaiguës avec polyadénopathies, on suspecte souvent, par argument de fréquence, une étiologie néoplasique solide ou lymphomateuse. L’histologie ganglionnaire révèle souvent une inflammation granulomateuse parfois avec nécrose caséeuse. Les étiologies infectieuses à évoquer sont alors – outre la classique tuberculose – les bactéries atypiques intracellulaires : Coxiella, Bartonella, Tropheryma whipplei et Francisella tularensis. Le diagnostic se fait alors par biologie moléculaire (PCR)±sérologie mais la reprise de l’interrogatoire, en insistant sur la recherche d’un contact avec des lagomorphes (lapins, lièvres), peut déjà fortement l’orienter. La tularémie est une maladie à déclaration obligatoire et il existe un Centre national de Référence (CNR) situé à Grenoble. Parmi les 433 cas recensés par le CNR entre 2002 et 2012 [4], la forme ulcéroganglionnaire était la plus fréquente (72 %) comparativement aux formes typhoïdiques et pulmonaires (10 % chacune). Les hémocultures n’étaient positives que dans 23 % des 130 cas confirmés. Il existait un lien entre source d’exposition et expression clinique, la forme systémique (n=72) étant plus fréquemment associée à une activité extérieure (49 %) qu’à un contact lagomorphe (26 %), contrairement à la forme ulcéroganglionnaire (n=281), plus fréquente en cas de contact (51 %) qu’en cas d’activité extérieure (21 %). Le rapport de ces 4 cas souligne le polymorphisme de la tularémie et l’intérêt de l’évoquer rapidement dans le bilan diagnostic d’une pathologie granulomateuse, même avec nécrose caséeuse, en zone de faible endémie tuberculeuse. Soulignons également l’intérêt de la déclaration obligatoire et le recensement des cas par le CNR, qui nous permet une amélioration continue des connaissances concernant cette pathologie potentiellement grave notamment dans ses formes systémiques [1 , 2 , 3 ].
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Vol 38 - N° S2
P. A233-A234 - décembre 2017 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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