Les rouages politique, administratif et scientifique de la santé et de la sécurité qui génèrent des inégalités de santé chez des travailleurs vulnérables - 04/02/19
Résumé |
Les entreprises misent de plus en plus sur l’hyperflexibilité des travailleurs pour réduire leurs coûts de production, entraînant ainsi une précarisation du travail. Pour freiner les effets de cette précarisation sur la santé des travailleurs, il faut comprendre les mécanismes politiques, administratifs et scientifiques de la SST qui génèrent des inégalités de santé.
Cette communication repose sur les constats d’une revue de la littérature (n=200), d’une consultation d’experts (n=20) et d’un débat impliquant des décideurs, des praticiens et des scientifiques (n=80) sur la santé et la sécurité de travailleurs cumulant des précarités :
– du lien d’emploi (travail autonome, sous-traitance, sur appel, agence par intérim, travail saisonnier transnational) ;
– de statut (immigrant, réfugié) ;
– de reconnaissance des acquis (diplômes, expériences) ;
– de revenu (salaire minimum, revenu instable).
Cette communication tente de répondre aux questions suivantes :
– Quels mécanismes mettent les travailleurs cumulant des précarités en marge des pratiques de SST ?
– Comment contrer ces mécanismes pour mieux protéger la santé des travailleurs en situation de précarité ?
Pour illustrer la production des inégalités de santé attribuables au travail, la revue de littérature s’est centrée sur pour trois profils de travailleurs :
– les travailleurs d’agence de location de personnel ;
– les travailleurs étrangers temporaires agricoles et peu spécialisés ;
– les travailleurs des petites entreprises non syndiquées (<50 travailleurs).
Les constats sont divers. Les lois de SST n’excluent aucunement les employeurs de leurs obligations envers tous les travailleurs. Par contre, ces travailleurs n’étant pas expressément nommés dans les règlements, ils n’existent pas dans les registres de données de surveillance de l’état de santé des travailleurs. Les statistiques ne permettent pas de circonscrire la proportion de travailleurs ayant des liens précaires d’emploi au sein d’une entreprise. Ils sont confondus parmi la masse des travailleurs. Pour déconstruire ces mécanismes produisant et entretenant des inégalités sociales de santé attribuable au travail, il faut :
– revoir les indicateurs de surveillance de l’état de santé pour inclure des variables pouvant circonscrire les diverses formes de précarité du lien d’emploi ;
– dresser un portrait des entreprises clientes (taille, secteur d’activité, secteur géographique des activités principales) ayant recours aux travailleurs à statut précaire et identifier la proportion des dépenses qu’elles attribuent à la masse salariale comparativement à l’achat de services de main-d’œuvre ;
– faire état de la santé des travailleurs ayant des liens d’emploi précaire en termes de fréquence, de gravité, d’aggravation, de capacité à la réadaptation, et comparer ces données avec les travailleurs en situation régulière d’emploi.
Ainsi, nous pourrons documenter les inégalités de revenu et de soutien aux travailleurs en situation de précarité, et conséquemment raffiner les analyses épidémiologiques et adapter les pratiques préventives de SST auprès des entreprises ayant recours aux diverses formes de sous-traitance.
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Vol 67 - N° S1
P. S63-S64 - février 2019 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.