Une série rétrospective multicentrique évaluant les caractéristiques, la prise en charge et l’évolution des thrombopénies amégacaryocytaires acquises - 24/11/21
Résumé |
Introduction |
La thrombopénie amégacaryocytaire acquise (TAA) est une maladie extrêmement rare caractérisée par une aplasie ou hypoplasie mégacaryocytaire isolée, sans anomalie des autres lignées. Les données disponibles concernant cette entité étant limitées, le premier objectif de notre étude était de décrire les caractéristiques, la prise en charge et l’évolution des patients atteints de TAA, le second objectif était d’évaluer la réponse aux traitements au travers d’une revue systématique des cas publiés.
Patients et méthodes |
Nous avons mené une étude rétrospective multicentrique au travers du réseau des centres de référence des cytopénies auto-immunes de l’adulte, incluant les patients adultes avec une thrombopénie acquise <50×109/L, associée à un ratio mégacaryocytes/granuleux ≤50 % à la biopsie ostéo-médullaire (BOM), diagnostiqués entre juillet 2007 et février 2020. Les critères d’exclusion étaient: anomalies de la lignée granuleuse, signes de dysplasie, infiltration médullaire par des cellules tumorales ou une hémopathie maligne, anomalies significatives du caryotype, et clone significatif d’hémoglobinurie paroxystique nocturne. Les BOM étaient relues de façon centralisée. Les données des dossiers médicaux étaient recueillies via un questionnaire formalisé du centre de référence pour les thrombopénies immunologiques (PTI). La réponse aux traitements était déterminée selon les critères standardisés internationaux pour le PTI: la réponse (R) et la réponse complète (RC) étaient définies par des plaquettes >30×109/L associé à un doublement du compte plaquettaire, et des plaquettes >100×109/L respectivement; la réponse globale comme la présence d’une R ou d’une RC. Nous avons conduit une revue systématique de la littérature en langue anglaise dans les bases de données Medline et Scopus depuis 1970 jusqu’à avril 2021. Les cas inclus avaient des plaquettes <50×109/L et un examen ostéo-médullaire mettant en évidence une hypoplasie ou aplasie mégacaryocytaire sans diagnostic différentiel.
Résultats |
Nous avons évalué 23 patients rapportés comme des thrombopénies avec hypoplasie ou aplasie mégacaryocytaire. Onze patients ont été exclus en raison: de la présence de mégacaryocytes sur la BOM malgré une aplasie mégacaryocytaire au myélogramme (n=2), de l’absence de BOM (n=4), d’une moelle hypo- ou aplasique (n=3), d’une thrombopénie modérée >50×109/L (n=1), d’un manque de données (n=1). Les 12 patients inclus avaient un âge médian de 52,5 ans, 5/12 (41,7 %) étaient de sexe féminin, 6/12 (50 %) avaient un antécédent de maladie auto-immune. L’ensemble des BOM relues à ce jour contenaient des infiltrats lymphocytaires T CD8+. Huit patients avaient reçu un traitement de première ligne par corticoïdes et/ou immunoglobulines intraveineuses (IgIV), 1 seule réponse était observée. Dix patients avaient reçu de la cyclosporine en monothérapie à doses variables, avec 4 RC et 1 R, ou en association à divers traitements avec des réponses hétérogènes. Six avaient reçu une monothérapie par agonistes des récepteurs de la thrombopoïétine (AR-TPOs) induisant 5 RC. Finalement, 9 patients (75 %) atteignaient une RC en fin de suivi, obtenue sous cyclosporine seule dans 3 cas, cyclosporine en association avec des AR-TPOs ou du sérum anti-lymphocytaire dans 2 cas, du cyclophosphamide suivi de mycophénolate mofétil dans 1 cas, et des AR-TPOs seuls chez 4 patients (dont 3 avaient reçu préalablement au moins un traitement immunosuppresseur). Après un suivi médian de 4 ans (1,2–11,9), 2 (16 %) patients développaient finalement une aplasie médullaire, 7 et 41,5 mois respectivement après le diagnostic de TAA. La revue systématique de la littérature retrouvait 108 articles, parmi lesquels 75 articles rapportant 85 cas ont été inclus dans l’analyse. L’analyse groupée des nouveaux cas et des cas issus de la littérature incluait 97 cas. Les taux de réponse globale aux corticoïdes et aux IgIV étaient respectivement de 22,4 % et 5,3 %. La cyclosporine était utilisée en monothérapie chez 37,1 % des patients, avec un taux de réponse globale de 66,7 %. Les AR-TPOs étaient utilisés dans 9 cas, avec une RC chez 7 patients (77,8 %). Au total, 9/97 patients (9,3 %) développaient une aplasie médullaire au cours du suivi. La présence d’un thymome était associée à un risque augmenté d’évolution vers l’aplasie médullaire (OR 6,83 (IC95 % 1,22-34,00, p=0,020)).
Conclusion |
Notre étude souligne que l’évolution et la prise en charge des thrombopénies amégacaryocytaires acquises diffèrent du PTI. Les corticoïdes et IgIV sont inefficaces dans la plupart des cas. La cyclosporine apparaît comme le traitement le plus efficace. Les AR-TPOs pourraient également être une option intéressante, en monothérapie ou en association. Des données complémentaires seront nécessaires pour définir leur place respective.
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Vol 42 - N° S2
P. A338-A339 - décembre 2021 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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