Immunothérapie chez les patients de 70 ans et plus : évaluation des pratiques oncogériatriques et toxicité - 18/06/23
Résumé |
Un des enjeux de l’immunothérapie par inhibiteurs de checkpoint (ICP) est sa prescription pour des populations fragiles, comorbides et « de vie réelle ». Il s’agit notamment des patients de plus de 70 ans, sous-représentés dans les essais cliniques [1]. Les effets indésirables graves de l’immunothérapie ont été décrits dans les essais cliniques comme moins fréquents que ceux survenant après la chimiothérapie [2]. Néanmoins, ces effets indésirables graves peuvent se cumuler et altérer la qualité de vie [3, 4]. Une large étude internationale a évalué les toxicités immunomédiées chez des patients de plus de 80 ans, mais sans décrire le circuit de prise en charge spécifique à l’oncogériatrie [5]. Il existe des recommandations de sociétés savantes en faveur de l’évaluation des patients âgés (score G8, notamment) [6]. Également, il est communément admis en oncologie qu’il n’est pas pertinent qu’un patient ayant moins d’1 mois d’espérance de vie estimée reçoive un traitement systémique anticancéreux. Ainsi, nous nous proposons d’évaluer nos pratiques dans le contexte de l’oncogériatrie chez les patients recevant de l’immunothérapie. Nous avons colligé une cohorte monocentrique rétrospective de 476 patients adultes recevant un ICP (anti-PD(L)1, anti-CTLA4) en monothérapie, ou association de double immunothérapie, quelle que soit la ligne thérapeutique en indication métastatique ou localement avancée non résécable répondant à l’AMM, toutes tumeurs. Parmi ces patients, 120 (25 %) avaient 70 ans ou plus à l’initiation de l’ICP, l’âge médian de la cohorte à l’initiation était de 63,8 ans. Il s’agissait principalement de patients traités pour un primitif ORL (n=133), carcinome rénal à cellules claires (n=114), carcinome urothélial (n=40), carcinome bronchique non à petites cellules (n=134 = et mélanome de l’uvée (n=31). Les patients de 70 ans ou plus n’ont pas présenté plus de toxicité de grade supérieure ou égale à 3 que les patients plus jeunes 8,3 % (n=10) vs 10,7 % (n=38) p=0,57. Trois décès toxiques sont survenus, uniquement chez des patients de plus de 70 ans. Parmi les patients de 70 ans ou plus, 33 % (n=40) avaient un score G8 reporté dans le dossier et 67 % (n=27) des scores G8 étaient pathologiques (G8 ≤ 14). Parmi ces patients avec un score G8 pathologique, 16 (59 %) bénéficiaient d’une consultation d’oncogériatrie. Huit pour cent (n=7) des patients de plus de 70 ans ont reçu une cure d’ICP dans le mois précédant leur décès, contre 18 % (n=47) chez les moins de 70 ans (p=0,047). Tous traitements systémiques confondus (ICP ou lignes suivantes après arrêt de l’ICP : chimiothérapie, inhibiteurs de tyrosine kinase), 15 % (n=13) des patients de plus de 70 ans ont reçu un traitement dans le mois précédant leur décès vs 31 % (n=81) chez les moins de 70 ans (p=0,008). Parmi les patients ≥ 70 ans qui avaient un score G8 disponible, aucun ne recevait d’ICP dans le mois précédent son décès (p=0,22 versus pas de G8 réalisé) et aucun ne recevait de traitement systémique dans le mois précèdent son décès (p=0,04, versus pas de G8 réalisé). Parmi ceux ayant bénéficié d’une consultation d’oncogériatrie, aucun ne recevait d’ICP et 1 seul (8 %) recevait un traitement systémique dans le mois précédant le décès contre respectivement 7 (10 %) (p=0,54) et 12 (17 %) (p=0,68) chez ceux n’ayant pas de consultation. Le profil de toxicité de grade supérieur ou égal à 3 semble rassurant chez les patients âgés de plus de 70 ans dans notre cohorte. On constate un nombre insuffisant de réalisation du score G8, et quand celui-ci est réalisé, malgré une valeur ≤ 14, seuil du score recommandant une évaluation oncogériatrique, peu de patients bénéficiaient de cette consultation. Parmi les patients ayant un score G8 disponible, aucun ne décède dans le mois suivant la dernière cure d’ICP. À l’inverse, aucun des patients décédés dans le mois suivant la dernière injection d’ICP n’avait eu de score G8 et/ou d’évaluation oncogériatrique, renforçant l’intérêt d’identifier les patients plus fragiles nécessitant, par exemple, un accès précoce aux soins palliatifs. En conclusion, l’analyse de notre cohorte montre un profil de toxicité des ICP rassurant chez les patients âgés de 70 ans et plus, mais renforce l’intérêt d’une prise en charge oncogériatrique pour mieux identifier les patients les plus fragiles.
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Vol 44 - N° S1
P. A98 - juin 2023 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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