L'incidence de l'infection par le VIH correspond au nombre de nouvelles infections au cours du temps ; elle est le seul indicateur capable d'appréhender réellement la dynamique de l'épidémie du VIH/sida. Son estimation est compliquée car on ne connait généralement pas la date à laquelle les individus s'infectent. La connaissance de l'incidence permet de déterminer la taille de l’épidémie cachée définie comme le nombre de personnes infectées par le VIH mais qui ignorent leur séropositivité. D'un point de vue santé publique, la connaissance de l’épidémie cachée est primordiale car les personnes infectées non diagnostiquées ne sont pas mis sous traitement et peuvent continuer à propager l’épidémie, en plus d'avoir un risque élevé de morbidité et de mortalité.

Nous avons développé un modèle multi-états basé sur l’évolution des sujets infectés à travers différents stades cliniques de la maladie (avec ou sans diagnostic VIH) et sur les données de surveillance des diagnostics VIH. Il s'agit d'un modèle de Markov non-homogène permettant d'estimer simultanément l'incidence du VIH et la distribution du délai entre l'infection et le diagnostic de séropositivité. Une vraisemblance pénalisée a été utilisée pour obtenir une estimation lisse de l'incidence du VIH. L'incidence est approchée sur une base de M-splines et une approximation du critère de validation croisée a été utilisée pour estimer le paramètre de lissage.

Les performances du modèle ont été étudiées à travers des simulations. La méthode a été appliquée aux données de surveillance nationale des diagnostics de séropositivité collectées par Santé publique France et a permis d'estimer l'incidence du VIH et l’épidémie cachée chez les HSH entre 2008 et 2018.

Le modèle multi-états proposé peut être appliqué pour estimer l'incidence du VIH à partir des données de mise sous traitement ARV potentiellement disponibles dans le contexte africain.