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Annexe 1 Recommandations concernant les prescriptions les plus courantes au cours de la grossesse et de l’allaitement - 07/10/11

Doi : 10.1016/B978-2-294-70150-4.00046-9 
É. Autret-Leca

AntidépresseursAntidépresseurs tricycliques ou imipraminiques (Tofranil® : imipramine ; Anafranil® : clomipramine)

Leur utilisation est possible quel que soit le terme de la grossesse. Lorsqu’ils sont utilisés jusqu’à l’accouchement, les manifestations néonatales qui surviennent dans la première semaine de vie sont le plus souvent transitoires et peu sévères. Elles sont de type atropinique et se traduisent par des troubles neurologiques (hypotonie, hyperexcitabilité, trémulations), respiratoires (polypnées, accès de cyanose) et digestifs (difficulté de l’alimentation, retard à l’émission de méconium, distension abdominale). Le passage lacté est mal connu. Par mesure de précaution, l’allaitement est à éviter pendant la durée du traitement par clomipramine. Si un nouveau-né est exposé en fin de grossesse et/ou via le lait maternel, une surveillance des fonctions neurologiques et digestives doit être envisagée pendant les premiers jours de vie.

Inhibiteurs de la recapture de la sérotonine

Pendant la grossesse, on préfère ne plus utiliser le Déroxat® (paroxétine), des études épidémiologiques suggérant une légère augmentation du risque de malformation cardio-vasculaire (communications interseptales) après exposition au premier trimestre. On privilégie les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine (IRS) ayant un plus grand recul d’utilisation et des données de tératogénicité et de fœtotoxicité rassurantes telles que le Prozac®, le Floxyfral® ou le Zoloft® (sertraline), plutôt que les IRS les plus récents (citalopram, escitalopram). L’exposition fœtale à un IRS en fin de grossesse expose le nouveau-né à un syndrome de sevrage ou d’imprégnation qu’il est souvent difficile de séparer. En outre, la possibilité de survenue d’une hypertension artérielle pulmonaire (0,6 à 1,2 %) a été soulevée. Enfin les IRS pouvant entraîner des ecchymoses et des syndromes hémorragiques chez l’adulte, ces éléments sont à rechercher chez le nouveau-né exposé en fin de grossesse, d’autant que des cas d’hémorragie cérébrale néonatale ont été rapportés avec la prise d’IRS (paroxétine, citalopram). L’arrêt de l’allaitement doit être envisagé si un traitement par Prozac® (fluoxétine) s’avère nécessaire. En effet, la quantité journalière de fluoxétine reçue par l’enfant serait de 6 à 17 % de la dose théorique pédiatrique, sa demi-vie est longue et des effets indésirables chez des nourrissons allaités ont été rapportés (irritabilité, cris, pleurs, diarrhée avec vomissements, faible prise de poids). En revanche, avec d’autres IRS, tels que la paroxétine (Deroxat®), la fluvoxamine (Floxyfral®) ou la sertraline (Zoloft®), l’allaitement bien que déconseillé peut être autorisé sous couvert d’une surveillance du comportement du nouveau-né. En effet, la quantité rapportée au poids reçue par un enfant allaité est estimée à 0,4 % pour la paroxétine, 0,5 % pour la fluvoxamine et 2 % pour la sertraline. De plus, il n’a pas été mis en évidence d’effets indésirables chez l’enfant allaité. L’allaitement est déconseillé en cas de traitement par citalopram, en l’absence de données suffisantes. Bien qu’on estime que l’enfant recevrait via le lait 0,2 à 6 % de la posologie thérapeutique rapportée au poids, cette recommandation doit être respectée car des manifestations cliniques (difficultés d’endormissement, diminution de l’appétit, irritabilité, agitation) ont été rapportées chez quelques enfants allaités. Si un IRS est poursuivi jusqu’au terme, et a fortiori si la maman allaite, une surveillance du comportement du nouveau-né est vivement recommandée.

AntihypertenseursBêtabloquants

Chez le nouveau-né de mère traitée, l’action bêta-bloquante persiste plusieurs jours après la naissance avec un risque de détresse respiratoire transitoire, de bradycardie, d’hypoglycémie et exceptionnellement, pour de fortes posologies, d’hypotension artérielle et d’insuffisance cardiaque, ce qui doit conduire à une surveillance néonatale de la fréquence cardiaque, de la glycémie et de la pression artérielle pendant les 3 à 5 premiers jours de vie. Au cours de l’allaitement, la préférence est donnée au propranolol (Avlocardyl®) en raison de son passage lacté très faible, correspondant à une quantité ingérée par l’enfant inférieure à 1 % de la dose pédiatrique. Les autres bêta-bloquants sont soit « déconseillés » (labétolol, Trandate®), soit « contre-indiqués » (aténolol, Ténormine®) selon les résumés des caractéristiques des produits. En effet, l’aténolol a des concentrations dans le lait supérieures à celle du plasma, et un cas de cyanose-bradycardie régressant à l’arrêt de l’allaitement a été rapporté chez un enfant de 5 jours dont la mère était traitée par 100 mg/j. Un contrôle de la glycémie et de la fréquence cardiaque du nouveau-né environ une semaine après le début de l’allaitement est nécessaire.

Inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC)/antagonistes de la rénine angiotensine (Ara II)

L’exposition au cours des deuxième et troisième trimestres peut être à l’origine d’une modification du développement rénal conduisant à un oligamnios et à une insuffisance rénale néonatale souvent irréversible. Ces médicaments sont donc formellement contre-indiqués durant la grossesse, et un relais le plus tôt possible par un autre antihypertenseur est nécessaire dès sa découverte. L’énalapril et le captopril semblent compatibles avec l’allaitement puisqu’un enfant allaité par une mère traitée recevrait 0,1 % de la posologie d’énalapril rapportée au poids et 0,02 % de celle de captopril. L’allaitement est déconseillé chez la femme traitée par un AraII.

Inhibiteurs calciques

La tolérance néonatale est peu connue mais celle de la nicardipine semble satisfaisante. Des essais cliniques ont montré un effet tocolytique de la nifédipine qui est actuellement utilisée hors autorisation de mise sur le marché dans la menace d’accouchement prématuré. L’allaitement peut être autorisé chez la femme traitée par vérapamil, nicardipine et nifédipine. En effet, la quantité reçue par un enfant allaité est estimée à 1 % de la posologie rapportée au poids pour le vérapamil, 0,3 % pour la nicardipine (150 mg/j par voie orale et 120 mg/j par voie veineuse chez la mère) et 1,8 % pour la nifédipine.

Anti-épileptiquesValproate de sodium (Dépakine®)

Il est déconseillé pendant la grossesse, du fait de cas d’anomalies de fermeture du tube neural. Une augmentation des difficultés scolaires en rapport avec une diminution des fonctions verbales a été rapportée chez les enfants exposés in utero. L’allaitement est également déconseillé même si on ne dispose pas de données précises. Cependant, le valproate de sodium passe faiblement dans le lait maternel (l’enfant recevrait 4 % de la posologie pédiatrique) et aucun trouble n’a été rapporté chez l’enfant allaité hormis un cas de purpura thrombopénique associé à des pétéchies qui ont régressé après l’arrêt de l’allaitement.

Carbamazépine (Tégrétol®) et oxcarbazépine (Trileptal®)

Le risque néonatal de ces produits est lié à leurs propriétés sédatives et à leur effet inducteur enzymatique. Leur utilisation pourrait être à l’origine d’hémorragies par avitaminose K d’où la nécessité d’une supplémentation de la mère et d’accroître celle du nouveau-né. L’allaitement est « déconseillé » en raison d’un passage lacté variable selon les résumés des caractéristiques du produit. Si l’allaitement est autorisé, il le sera sous couvert de la surveillance du comportement du bébé (succion, sédation), ainsi que d’une augmentation du nombre de doses (deux à trois par semaine) de vitamine K (inducteur enzymatique) par rapport à celles préconisées en cas d’allaitement maternel exclusif. De rares cas d’augmentation transitoire des transaminases, d’hyperbilirubinémie associée ou non à une augmentation de gamma GT, de sédation ou de difficulté de succion ont été rapportés chez des bébés allaités par une mère traitée par des doses supérieures ou égales à 400 mg/j.

Lamotrigine (Lamictal®)

Chez le nouveau-né exposé en fin de grossesse, il n’a pas été identifié de manifestations particulières à l’exception de rares cas isolés de détresse respiratoire et de syndrome de sevrage. L’allaitement est contre-indiqué en raison d’un passage lacté non négligeable et du risque possible de sédation et de réactions cutanées. S’il est envisagé, une surveillance étroite du nouveau-né (sédation, succion, poids, rash) est nécessaire.

Topiramate (Epitomax®)

Des cas isolés de détresse respiratoire, de troubles de la succion, de petits poids de naissance, d’acidose métabolique et de tremblements ont été rapportés chez des nouveau-nés exposés en fin de grossesse. Par ailleurs, le topiramate pouvant entraîner chez le patient traité somnolence, agitation, fatigue, anorexie et troubles visuels, ces manifestations sont à rechercher chez le nouveau-né exposé. L’allaitement est déconseillé mais, s’il est autorisé (l’enfant recevrait 16 % de la posologie pédiatrique), il le sera sous couvert de la surveillance du comportement (sédation, agitation, troubles de succion) et du poids du nouveau-né et d’un dosage sérique du topiramate à la naissance et au 7e jour de vie.

Gabapentine (Neurontin®)

Le recul d’utilisation étant insuffisant et s’agissant d’un médicament sédatif, le risque lié à ce médicament est susceptible de survenir chez le nouveau-né exposé en fin de grossesse. L’allaitement est déconseillé. S’il est autorisé (l’enfant recevrait 4 % de la posologie pédiatrique), il le sera sous couvert de la surveillance du comportement du nouveau-né (sédation, faible succion, agitation) et d’un éventuel dosage du médicament au cordon puis au bout d’une semaine.

Autres traitements anti-épileptiques

L’allaitement n’est « pas recommandé » avec le lévétiracétam (Keppra®). S’il est autorisé (l’enfant recevrait 8 % de la posologie pédiatrique), il le sera sous couvert de la surveillance d’effets sédatifs. Il n’est « pas recommandé » non plus avec le vigabatrin (Sabril®). Si l’allaitement est autorisé, il le sera sous couvert de la surveillance du comportement du nouveau-né (sédation, agitation) et en sachant qu’un risque de lésions rétiniennes comme chez le sujet traité ne peut être exclu.

Anti-inflammatoires non stéroïdiens

Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) ayant un effet inhibiteur de l’acide arachidonique sont contre-indiqués à partir du sixième mois de grossesse (risque d’hypertension artérielle pulmonaire et de fermeture prématurée du canal artériel avec anasarque). La plupart sont « à éviter » pendant l’allaitement. Cependant, la quantité maximale absorbée par le nouveau-né a été estimée à 0,7 % de la posologie thérapeutique pour le kétoprofène et à 1 % pour l’ibuprofène. Les risques sont ceux des AINS dose-dépendants pour la plupart (rénal, digestif) ou peu décrits chez le nouveau-né (toxidermie, hémorragie), autorisant un traitement ponctuel (2 à 3 jours) pendant l’allaitement pour ces deux AINS.

Benzodiazépines

Les risques sont des manifestations témoignant d’une « imprégnation » néonatale (hypotonie, somnolence, troubles de la succion et, à doses élevées, dépression respiratoire et hypothermie). Un syndrome de sevrage néonatal (agitation, trémulation, hyperexcitabilité) est possible même en l’absence de signe d’imprégnation et son délai de survenue est fonction de la demi-vie d’élimination du médicament. Une surveillance du comportement et de la respiration est à prévoir si la benzodiazépine est poursuivie jusqu’au terme. L’allaitement est « à éviter » lors d’un traitement par benzodiazépines mais autorisé en cas de traitement ponctuel (2 à 3 jours) à faible dose.



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