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Polyarthrite rhumatoïde, hyperéosinophilie, clonalité T : deux observations - 22/11/15

Doi : 10.1016/j.revmed.2015.10.074 
M. Killian, S. Charmion, P. Cathébras
 Médecine interne, centre hospitalier universitaire de Saint-Étienne, Saint-Priest-en-Jarez, France 

Auteur correspondant.

Résumé

Introduction

L’association entre polyarthrite rhumatoïde (PR) et hyperéosinophilie a été signalée dans certaines publications depuis plus de 40ans [1], sans toutefois que des liens formels entre les deux conditions soient affirmés dans les rares cas où l’anomalie sanguine n’était pas expliquée par une autre étiologie (majoritairement parasitaire ou iatrogène) [2]. Nous rapportons les observations de deux hommes, tous les deux suivis pour une PR séropositive (facteurs rhumatoïdes et anti-CCP) dont l’évolution a été marquée par l’apparition d’une hyperéosinophilie majeure avec clonalité T en biologie moléculaire faisant suspecter la survenue d’un syndrome hyperéosinophilique (SHE) lymphoïde.

Observation

Le premier patient était traité pour une PR sévère par anti-TNF (adalimumab puis infliximab) dès l’âge de 49ans (2009), combiné à un traitement de fond par méthotrexate (MTX) et à une corticothérapie à petite dose. Alors qu’il avait arrêté de lui-même MTX et corticoïdes, son taux de polynucléaires éosinophiles (PNE) s’élevait au-delà de 1,5G/L sur le bilan biologique réalisé lors de la perfusion d’infliximab de janvier 2015, jusqu’à sa venue aux urgences, en février 2015, où il culminait à 11,9G/L. Le diagnostic retenu était celui d’une iléocolite à éosinophiles devant l’existence de douleurs abdominales avec troubles du transit, d’un épaississement des côlons gauche et sigmoïde et de la dernière anse iléale au scanner, ainsi que devant des constatations histologiques compatibles sur les biopsies digestives (infiltrat de cellules inflammatoires avec de nombreux PNE dépassant parfois les 60/champs au grossissement ×400). Le second patient, dont les antécédents étaient marqués par une dilatation des bronches avec trouble ventilatoire obstructif, était traité par hydroxychloroquine et corticoïdes à petite dose (10mg/j) dès le diagnostic d’une PR assez bénigne, à l’âge de 67ans. Son taux de PNE évolua en deux phases : la première d’avril à octobre 2007, avec un pic à 4,G/L, suite à une ischémie aiguë de membre inférieur droit dont la cause était restée inconnue, et la seconde à partir de septembre 2010 avec des taux fluctuant entre 1 et 5G/L alors que le patient présentait plusieurs épisodes d’accidents vasculaires cérébraux ischémiques sans cause cardiaque ou vasculaire documentée, récidivant malgré l’anti-agrégation plaquettaire puis l’anti-coagulation mises en place, et sans autre facteur de thrombophilie potentiel que l’hyperéosinophilie (pour laquelle une aspergillose broncho-pulmonaire allergique avait été formellement écartée dans le contexte de bronchectasies). La mise en place d’une corticothérapie à 0,5mg/kg/jour dans le premier cas, et une intensification du traitement de la PR par rituximab dans le second, ont permis le contrôle des symptômes (respectivement digestifs et neurovasculaires) ainsi que la normalisation progressive des taux de PNE. Aucun des patients n’avait d’endocardite fibroblastique. Dans les deux cas, la PR était préalablement à l’hyperéosinophilie contrôlée par le traitement de fond. Aucun patient n’avait d’anomalies cytologiques et génétiques en faveur d’un variant myéloïde de SHE. Dans les deux cas, le large bilan étiologique réalisé ne retrouvait qu’un réarrangement clonal de la chaîne gamma du TCR, au niveau de Vγ10 pour le premier patient (d’emblée) et Vγ1f pour le second (après plusieurs années d’examens négatifs et alors qu’il était sous rituximab), sans anomalie phénotypique permettant d’affirmer un variant lymphoïde du SHE.

Discussion

Nous rapportons ici deux observations de patients atteints de PR séropositive chez qui un clone lymphoïde T pourrait être à l’origine d’un SHE, et pour qui l’intensification du traitement de la PR semble avoir été efficace sur le contrôle de l’hyperéosinophilie et des symptômes et lésions tissulaires lui ayant été imputés. L’absence d’anomalie patente de l’immunophénotypage dans les deux cas ne permet toutefois pas à ce stade d’affirmer le diagnostic de SHE lymphoïde.

Conclusion

L’étude d’une population plus large ainsi que la recherche systématique de population lymphocytaire clonale en cas d’hyperéosinophilie observée au cours d’une PR permettraient de déterminer la fréquence de cette association, les caractéristiques de ces patients par rapport aux PR classiques, et de savoir chez quels sujets la progression éventuelle vers un SHE lymphoïde patent devrait être redoutée.

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Vol 36 - N° S2

P. A132 - décembre 2015 Retour au numéro
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