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Les dispositifs d’inhalation dans les maladies respiratoires chroniques sont-ils bien utilisés et vraiment utilisables chez les plus de 65 ans ? - 22/11/15

Doi : 10.1016/j.revmed.2015.10.206 
M. Waththuhewa , I. Gest, F. Sohouenou, M. Devos, J. Doucet
 Médecine interne–gériatrie–thérapeutique, CHU de Rouen, Rouen, France 

Auteur correspondant.

Résumé

Introduction

L’asthme et la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) touchent 7 millions de personnes en France [1] dont 2,4 millions de patients de plus de 65ans. La fréquence, la sévérité et la mortalité de ces maladies respiratoires chroniques (MRC) augmentent avec l’âge du patient. Malgré le grand nombre et l’efficacité des traitements disponibles, le niveau de contrôle des MRC chez la personne âgée est insuffisant, une mauvaise technique d’utilisation pouvant conduire à l’inefficacité du traitement et à l’aggravation de la pathologie [2]. Notre étude visait à évaluer la technique d’utilisation des aérosols par des patients âgés atteints de MRC au CHU et en officine, puis à identifier les facteurs associés à une mauvaise technique d’utilisation.

Patients et méthodes

Dans cette étude observationnelle et prospective menée en 2014, les patients inclus avaient plus de 65ans et utilisaient en totale autonomie depuis au moins 1 mois un ou plusieurs dispositif(s) d’inhalation dans le cadre d’une MRC. Les patients étaient issus des services de pneumologie, médecine interne, EHPAD et SSR pour le CHU et de 3 officines régionales. Les données de notre étude provenaient de l’interrogatoire des patients, des observations médicales, des prescriptions et des historiques des patients. La manipulation des 5 types d’aérosols les plus prescrits pendant l’étude a été comparée à leurs notices d’utilisation et aux recommandations de bon usage respectives. Toute discordance entre l’énoncé d’une l’étape et sa réalisation par le patient était considérée comme une erreur. Les erreurs de manipulation ont été définies comme « critiques » (EC) lorsqu’elles altéraient significativement la dose atteignant les poumons.

Résultats

100 patients ont été inclus. L’âge moyen était de 77ans (extrêmes : 60–92) ; le sex-ratio de 0,89 (47 femmes, 53 hommes). Sur 128 manipulations, 110 (85,9 %) comportaient au moins une erreur dont 27 EC (21,1 %). Nous avons relevé une différence significative (p<0,02) dans la survenue des EC entre les patients avec troubles cognitifs (52 %) et sans (22,2 %), entre les patients asthmatiques (88,6 %) et BPCO (64,4 %) ; le dispositif Turbuhaler® semblait être le plus difficile à utiliser puisque 32,3 % des patients réalisaient au moins une EC. Les patients hospitalisés ou présentant des troubles moteurs et/ou sensoriels réalisaient a priori plus d’EC. Les facteurs sans impact étaient l’antériorité de la prescription ou du dernier apprentissage d’utilisation, l’âge et le sexe du patient et le nombre d’aérosols ou de médicaments chroniques. Une partie des patients ne recevait pas de façon régulière des conseils sur la technique d’utilisation appropriée de leurs inhalateurs. L’impact des troubles moteurs et sensoriels n’a pas été évalué en raison de leur présence multiple pour un même patient mais ils apparaissaient comme un frein à la bonne manipulation. Au total, 15 % des patients de notre étude maîtrisaient leur dispositif.

Discussion

La notion d’EC variait d’une référence bibliographique à l’autre. Elle englobait les erreurs qui altèrent de façon très importante le dépôt du principe actif au niveau des alvéoles pulmonaires. La définition d’EC n’étant pas consensuelle dans la littérature, nous avons choisi de définir comme EC toute erreur susceptible de supprimer l’effet thérapeutique par absence totale de dépôt pulmonaire à défaut de pouvoir mesurer l’impact de chaque erreur sur les taux de dépôt. Nos résultats sont donc peu juxtaposables aux autres études. Peu d’études existent sur les techniques d’utilisation des inhalateurs des patients âgés, hospitalisés ou non. On comptabilise notamment très peu d’enquêtes réalisées à l’officine. Au final, la bibliographie retrouve d’importants taux d’erreurs de manipulation dans la population générale ce qui laisse présager une situation au mieux équivalente dans la population gériatrique.

Conclusion

Notre étude suggère une prévalence élevée de mauvaise technique d’inhalation, qu’il s’agisse d’erreurs critiques ou non. L’extrapolation de nos résultats au niveau national estime une dépense annuelle de l’Assurance maladie de 29 millions d’euros pour les mauvais manipulateurs. Ces taux d’erreurs et ces chiffres préoccupants appellent à une prise en charge des patients renforcée et approfondie sur plusieurs niveaux. Les professionnels de santé doivent être conscients des erreurs récurrentes de leurs patients afin de réévaluer régulièrement la bonne utilisation de leurs aérosols et rappeler aussi souvent que possible les conseils sur le bon usage de leurs appareils.

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