Cet article vise à interroger les mécanismes psychiques inconscients de l’addiction au chemsex, afin de dégager des perspectives cliniques pour les patients concernés et, plus largement, de mettre en lumière ce que ce phénomène enseigne sur les coordonnées actuelles du malaise dans la culture.

La démarche repose sur l’analyse de la littérature scientifique et d’un cas clinique. La littérature convoquée inclut les principales enquêtes internationales sur le chemsex (épidémiologie, anthropologie, sociologie, psychologie, psychanalyse). Dans un premier temps, sont identifiées les circonstances et trajectoires susceptibles de conduire à l’addiction au chemsex. Le cas clinique présenté illustre ensuite une spécificité possible de la jouissance en jeu dans ces pratiques.

Le chemsex apparaît comme une zone de vulnérabilité cumulative, où s’articulent risque épidémiologique, facteurs socioéconomiques et vie psychique. Le phénomène fonctionne comme une ordalie où le sujet engage son corps et sa jouissance. Mais surtout, l’étude met en évidence le rôle central du clivage freudien entre courant tendre et courant sensuel, que l’addiction au chemsex exacerbe tout en tentant de le colmater.

Le chemsex apparaît ainsi comme un pharmakon singulier, mettant particulièrement en relief les liens entre amour et sexualité : même lorsque ces liens se présentent comme séparés ou clivés, ils demeurent indissolublement liés, et c’est ce paradoxe que la pratique met au jour. Au-delà du cas des homosexuels, le chemsex révèle donc une dimension de la condition humaine, où amour et jouissance restent inséparables jusque dans leur clivage.

Cette étude contribue à maintenir une approche processuelle du chemsex, sans le réduire à un déterminisme biologique ou comportemental. La psychanalyse se révèle ainsi particulièrement pertinente pour dégager des perspectives cliniques, tenant compte des coordonnées du malaise dans la culture. Loin de toute morale thérapeutique, elle montre que le chemsex traduit une problématique universelle, et que celle-ci peut trouver, selon les souhaits et possibilités des patients, des voies d’expression moins mortifères.

This article examined the unconscious psychological mechanisms of chemsex addiction to identify clinical perspectives for those affected and, more broadly, to highlight what this phenomenon teaches us about the current state of cultural malaise.

My approach was based on an analysis of the scientific literature and a clinical case. The literature review focused on the main international studies on chemsex (in epidemiology, anthropology, sociology, psychology, psychoanalysis). First, the circumstances and trajectories likely to lead to chemsex addiction were identified. Second, the clinical case was used to illustrate a possible specificity of the jouissance related to this practice.

Chemsex appears to be an area of cumulative vulnerability, where there is an intersection among epidemiological risk, socioeconomic factors, and psychological life. The phenomenon functions as an ordeal during which the subject commits his body and his jouissance. However, above all, the study highlights the central role of the Freudian split between tenderness and sensuality, which chemsex addiction exacerbates while also attempting to bridge the gap.

Chemsex thus appears to be a singular pharmakon, particularly highlighting the links between love and sexuality: even when these links appear to be separate or divided, they remain inextricably tied. It is this paradox that the practice brings to light. Looking beyond the case of homosexual individuals, chemsex reveals a dimension of the human condition, where love and pleasure remain inseparable even in their division.

This study took a processual approach to chemsex, without falling into biological or behavioral determinism. Psychoanalysis thus proves particularly relevant in identifying clinical perspectives, while simultaneously accounting for the current state of cultural malaise. Far from espousing any system of therapeutic morality, psychoanalysis shows that chemsex reflects a universal problem and that this problem can find less deadly avenues of expression, depending on the wishes and possibilities of those affected.