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Comment nommer la maladie de « celui qui n'a rien » ? - 17/02/08

Doi : ES-1-2004-1-1-0000-0000-101019-ART09 

J.P. Bondois [1]

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La hantise de méconnaître une maladie organique chez un patient souffrant de troubles fonctionnels pousse les médecins à la multiplication des examens complexes.

Le cas de Thérèse T., qui, au fil des années, va se plaindre de praticien en praticien d'une sensation d'écoulement rhinopharyngé postérieur qui ne fait jamais la preuve de son organicité, en est une illustration.

Cette recherche sans fin d'un diagnostic porte préjudice à la fois au patient qui sent sa souffrance progressivement niée et au médecin dont l'efficacité est mise en échec… Dans ces situations, et faute de pouvoir annoncer un diagnostic « dicible », la boucle infernale se poursuit.

Le patient a besoin que son trouble soit qualifié clairement, qu'il soit nommé afin de se représenter la maladie et pouvoir la traiter. Le médecin aussi…

Qu'avons-nous à notre disposition ?

Les notions de somatisation, de conversion, d'hypocondrie, de pathologie fonctionnelle sont les concepts nosologiques classiques.

Les références actuelles sont la CIM 10 et et le DSM 4 dans la rubrique « troubles somatoformes ».

Ce vocabulaire technique, à connotation souvent péjorative, n'est pas d'une grande utilité pour expliquer au patient sa maladie. Il s'agit d'une vision psychiatrisée. La prise en charge des patients souffrant de troubles somatoformes incombe pour la plupart des cas au médecin de famille.

Comment sortir de cette situation dont l'enjeu est médical, mais aussi social et économique ? En 1998, l'URCAM de la région Poitou-Charentes, en collaboration avec l'URML, a réalisé une étude qui indique que les troubles somatoformes sont très fréquents et ont une prévalence importante dans la population générale.

En fait, la difficulté à nommer le trouble ne représente qu'un aspect de la problématique.

L'erreur courante est de se laisser prendre au piège de soigner un symptôme alors qu'il s'agit de soulager une personne qui souffre. Le premier temps de ce soulagement passe par la reconnaissance de cette souffrance, par son expression en tant que ressenti, par le sens que ce symptôme pourrait avoir.

Accepter les limites de son savoir et de son efficacité implique pour le soignant une grande patience et de l'humilité. La mise en oeuvre d'une relation de personne à personne aura par elle-même un effet bénéfique, voire thérapeutique…

Le savoir théorique et la bonne logique ne suffisent pas : un apprentissage des fonctionnements psychologiques des soignés et, aussi des soignants, est nécessaire. L'enseignement clinique initial et la Formation Médicale Continue doivent tenir compte de l'importance et de l'intérêt des pathologies dites « fonctionnelles » dans la pratique courante, et donner au médecin les moyens d'en établir rapidement le diagnostic positif pour éviter l'impasse thérapeutique induite par la succession interminable des bilans inutiles.

What do you call “nothing”? Role of nosological categories of functional disorders

The fear of missing an organic disease in a patient suffering from functional disorders leads to the prescription of complex explorations. The case of a woman who complained for years about a sensation of persistent flow in the back of her throat to many physicians who searched vainly for an organic disorder is an illustrative example. This endless search for a diagnosis is prejudicial to the patient who progressively comes to the conclusion that the existence of the disorder is denied and to the physician who fails to be effective. In such situations, the lack of a diagnostic “tag” paves the way to a vicious circle. The patient needs a clear qualification of the ailment, but how can you treat a condition if you can't name it?

What can be proposed? Somatisation, conversion, hypochondria, or functional disorder are classical nosological concepts. The current reference from the CIM10 and the DSM4 is “somatoform disorders”. This technical vocabulary, with its often pejorative connotation, is not particularly useful for explaining the disorder to the patient, a problem generally handled by the family physician who cares for most patients with somatoform disorders. How can this problem with not only medical but also social and economical consequences be overcome? In 1998, the Poitou-Charentes regional healthcare funds conducted a study which detailed the high incidence and prevalence of somatoform disorders in the general population. Actually, naming the disorder was found to be only one aspect of the problem.

The most common pitfall is to concentrate on relieving a symptom while the objective should be to relieve the patient. The first step involves recognizing that the patient suffers, understanding what the suffering entails and searching for the meaning of the symptom. Accepting the fact that one's knowledge and efficacy are limited implies a good deal of patience and humility, but establishing a working person-to-person relationship can have a beneficial or even therapeutic effect in itself.

Theoretical knowledge and good logic are insufficient. Healthcare givers like healthcare receivers must learn more above psychological functioning. Medical school training and continuing education should put more weight on “functional” disorders encountered in daily practice in order to provide the physician with the means of rapidly establishing a positive diagnosis and avoiding the therapeutic dead end resulting from unending and unnecessary explorations.


Mots clés : patients fonctionnels , troubles somatoformes , somatisations , abus de prescriptions

Keywords: functional patients , somatoform disorders , abusive precription


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Vol 1 - N° 1

P. 37-41 - janvier 2004 Retour au numéro
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