Caractéristiques atypiques de crises rénales sclérodermiques : à propos de 4 cas d’un centre de néphrologie français - 23/11/17
Résumé |
Introduction |
La crise rénale sclérodermique (CRS) est une complication rare de la sclérodermie systémique (SSc) survenant dans 2–15 % des cas [1 ] et caractérisée par la survenue brutale d’une hypertension artérielle associée à une insuffisance rénale aiguë et/ou une oligurie. Une microangiopathie thrombotique accompagne environ 50 % des CRS. Les principaux facteurs de risque de CRS sont les SSc diffuses, une durée de la pathologie inférieure à 4 ans ainsi que la présence d’anticorps anti-RNA polymérase [1 , 2 ]. Nous décrivons ici une courte série monocentrique de quatre patients ayant présenté une crise rénale sclérodermique avec des caractéristiques cliniques et biologiques atypiques apparues presque simultanément sur une période de 3 mois.
Observation |
Notre série comportait 1 homme et 3 femmes, d’âge moyen de 55 ans (34–80). Les 4 CRS sont survenues entre octobre et décembre 2016. L’ensemble des patients présentait une sclérodermie diffuse avec présence d’anticorps anti-Ssl-70 chez 1 patient sur 4. La durée d’évolution de la maladie était inférieure à 4 ans pour 3 patients sur 4. Une corticothérapie précédait la CRS chez 2 patients. Aucun des 4 patients n’était traité par un IEC/ARAII au moment de la survenue de la CRS. Les anticorps anti-RNA polymérase III ont été recherchés chez 3 patients et positifs chez 1 seul d’entre eux. Trois patients sur 4 étaient suivis en service de pneumologie pour une atteinte pulmonaire secondaire à la sclérodermie. Trois présentaient une pneumopathie interstitielle diffuse (PID), 2 une HTAP. Pour 1 patient, l’HTAP était associée à la sclérodermie. Pour l’autre, l’HTAP était secondaire à une évolution prolongée d’une fibrose pulmonaire. La présentation de la CRS était une HTA maligne pour 2 patients. Une microangiopathie thrombotique (MAT) était présente chez 75 % des cas. Les 4 patients présentaient une insuffisance rénale aiguë oligurique avec nécessité de dialyse. Une biopsie rénale était effectuée chez 3 patients, révélant dans les 3 cas la présence de lésions de MAT à la fois vasculaire et glomérulaire. Des lésions de nécroses tubulaires aiguës étaient retrouvées sur l’une des biopsies. Pour les 4 patients, la tension artérielle était contrôlée en moins de 24heures avec l’utilisation d’anticalciques injectables. Aucun des 4 patients n’a pu être sevré de la dialyse à 6 mois de la CRS. Deux patients sont décédés.
Discussion |
L’âge moyen est concordant avec les études cliniques retrouvant selon les cohortes des âges moyens de 50 à 53 ans [2 ]. Concernant les facteurs de risque de CRS, de manière similaire à la cohorte de Guillevin et al. [3 ], une majorité des patients présente une évolution de la maladie inférieure à 4 ans (75 % contre 79 % [3 ]), une forme diffuse de sclérodermie (100 % contre 86 % [3 ]) ou une corticothérapie précédant la CRS (50 % contre 70,3 % [3 ]). Les anticorps anti-RNA polymérase sont un facteur de risque de CRS. Seul 3 des 4 patients ont bénéficié d’une recherche de ces anticorps. Un seul patient a des anticorps positifs ce qui est concordant avec les pourcentages aux alentours de 30 % rapportés dans la littérature [2 ]. Dans les études, ces anticorps étaient indépendamment associés à l’absence de fibrose pulmonaire2et ainsi de manière attendue, la seule patiente avec anticorps positifs est celle sans atteinte pulmonaire. De manière surprenante, 3 des 4 cas sont suivis pour une PID associée à la sclérodermie. Deux patients présentent également une HTAP. La survenue d’une CRS chez des patients avec une PID et/ou HTAP n’est pas classique. Guillevin et al., rapporte seulement 4,4 % (4/91) des patients atteints de CRS étaient également atteints d’une HTAP [3 ]. Les 4 cas de CRS, survenus de manière extrêmement rapprochée, sont marqués par une présentation sévère. Les 4 patients ont présenté une insuffisance rénale aigüe oligurique nécessitant une dialyse de manière définitive. Dans la cohorte française, l’insuffisance rénale oligurique est retrouvée chez seulement 28,6 % (26/91) des cas. La dialyse était nécessaire chez seulement 53,5 % (49/91) des patients [3 ]. Une MAT est retrouvée chez 3 patients sur 4 contre 56 % dans la cohorte de Guillevin [3 ]. Devant l’association étonnante entre la présence d’une atteinte pulmonaire de la sclérodermie et la survenue de la CRS, une enquête médicamenteuse est réalisée. Parmi les 3 patients atteints de PID et/ou HTAP, 1 patient est traité par un agoniste des récepteurs à la prostacycline et 1 par un analogue de la prostacycline. Aucun autre lien n’a pu être établi entre ces 3 patients.
Conclusion |
Nous rapportons 4 cas de CRS sévères survenues de manière rapprochée en 3 mois avec une fréquence élevée de la nécessité de dialyse. L’association de la CRS à une atteinte pulmonaire de la sclérodermie est inhabituelle. L’enquête autour de nos 4 cas n’a pas permis de mettre en évidence d’explication à cette association.
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Vol 38 - N° S2
P. A193-A194 - décembre 2017 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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