Quelques éléments de l’histoire des premiers services ouverts en France - 30/05/23
Some elements of the history of the first “Open Psychiatric Wards” in France
: Psychiatre hospitalier honoraire, Docteur en histoire à l’E.P.H.E.Résumé |
Objectif |
En France, la création à Paris de l’hôpital Henri-Rousselle et son service ouvert – d’hospitalisation psychiatrique non soumis à la Loi du 30 juin 1838, il y a tout juste cent ans, marque traditionnellement la fin de la période asilaire. Dans le premier quart du siècle dernier, plusieurs autres expériences avaient toutefois été conduites dans la même perspective d’ouverture de la psychiatrie, dans les hôpitaux généraux et dans quelques établissements spécialisés avant et après la Grande Guerre. Le présent travail vise à préciser le sens de quelques termes spécialisés alors en usage dans le milieu médical et à comparer les objectifs et les moyens mis en œuvre par les auteurs de ces diverses expériences.
Méthodes |
Les rapports, publications et communications scientifiques de la période étudiée sont consultés, confrontés et analysés.
Résultats |
L’objectif premier des services implantés au sein des hôpitaux généraux sous le nom de service de délirants, service de psychiques, salles d’isolement, etc. était d’assurer le traitement des personnes souffrant de pathologies organiques à expression psychiatrique, délirants d’hôpitaux et agités bruyants : Régis à Bordeaux en 1902, Gilbert Ballet à l’Hôtel-Dieu de Paris en 1904 ouvriront la voie à plusieurs autres réalisations. Certains de ces services ont aussi une fonction de triage, d’où, après un temps d’observation, l’aliéné est orienté vers l’asile. Les services hospitaliers publics pour maladies nerveuses proposaient aux personnes souffrant de troubles appelés psychonévroses puis névroses des cures libres aux plus démunis, tandis que les classes aisées fréquentaient les établissements privés. Quant aux services ouverts créés au sein ou en annexe des asiles, leur vocation initiale était également de répondre à ces mêmes besoins non satisfaits plutôt que d’améliorer la prise en charge des aliénés. À la Clinique d’Esquermes avec Georges Raviart et à Fleury-les Aubrais avec James Rayneau sont conduites deux expériences hors du commun, source d’inspiration pour le courant réformateur aliéniste, la première où tous les malades sont à leur entrée placés sous loi de 1838, la seconde où certains sont soumis au régime hospitalier commun. Pendant la première guerre mondiale, les Centres neuropsychiatriques militaires offrent aux médecins d’asile mobilisés un nouveau champ d’exercice auprès de psychonévrosés et confus qui ne sont pas ordinairement rencontrés dans les asiles.
Discussion |
Le terme de service ouvert renvoie à des réalisations très diverses, répondant à des besoins particuliers, aux premiers rangs desquels l’enseignement complet aux étudiants en médecine et une meilleure prise en charge des pathologies neuropsychiatriques organiques et des pathologies névrotiques. Les réalisations visant à améliorer les soins aux aliénés dans les asiles du même nom seront aussi rares que tardives.
Conclusion |
Dans l’entre-deux-guerres, les insuffisances du système asilaire conduisent à plusieurs initiatives, dont celle d’André Mahon à Mont-de-Marsan est fort proche de ce qui sera généralisé dans les années 1950 dans les hôpitaux psychiatriques où, comme à Fleury-les-Aubrais précédemment, malades en cure libre et malades internés partagent les mêmes locaux : avec Mahon, le service est ouvert à tous. Quant à la réalisation d’Edouard Toulouse qui marquera son temps, elle inspire l’importante circulaire Rucart de 1937 et le Règlement-modèle de 1938 dont le début de mise en application devront tout de même attendre une vingtaine d’années.
Le texte complet de cet article est disponible en PDF.Abstract |
Aims |
In France, the creation in Paris of Henri-Rousselle Hospital and its “open” psychiatric ward, not subject to the Law of June 30th 1838, one hundred years ago, traditionally marks the end of the asylum period. In the first quarter of the last century, however, several other experiments had been conducted with the same perspective of opening up psychiatry, in general hospitals and in some specialized establishments before and after the First World War. This work aims to clarify the meaning of some specialized terms then in use in the medical field and to compare the objectives and the means implemented by the authors of these various experiments.
Methods |
The reports, publications, and scientific communications of the period studied are consulted, compared, and analyzed.
Results |
The primary objective of the services established within general hospitals (variously called wards for delirious patients, wards for psychic patients, isolation rooms, etc.) was to ensure the treatment of people suffering from organic pathologies with psychiatric expression: delirious, overexcited, and noisy persons. Emmanuel Régis in Bordeaux in 1902, or Gilbert Ballet at the Hôtel-Dieu in Paris in 1904 paved the way for other achievements. Some of these wares also have a triage function, from which, after a period of observation, the insane person is directed to an asylum. Public hospital services for nervous diseases offered to the person suffering from disorders called psychoneuroses and then neuroses, free cures for the poorest, while the wealthy classes frequented private establishments. As for the open psychiatric wards created within or as annexes to the asylums, they were also for the most part initially intended to respond to these same unmet needs, rather than to improve upon care of the insanes. At the Clinique d’Esquermes with Georges Raviart and at Fleury-les-Aubrais with James Rayneau, two extraordinary experiments were carried out, a source of inspiration for the reformist alienist current, the first in which all patients were placed under the law of 1838, the second in which some were subject to the common hospital regime. During the First World War, the military neuropsychiatric centers offered to asylum doctors enlisted a new field of practice with psychoneurotics and confused patients who were not usually encountered in asylums.
Discussion |
The term open psychiatric ward refers to a wide variety of achievements, responding to specific needs, mainly full education for medical students and better care of organic neuropsychiatric pathologies and neurotic pathologies. The achievements aimed at improving the care of “alienated” patients placed in asylum would be a rarity and an afterthought.
Conclusion |
In the interwar period, the shortcomings of the asylum system finally led to several initiatives, including that of André Mahon in Mont-de-Marsan, which is very close to what would be generalized in the 1950s in psychiatric hospitals; as had previously been enacted in Fleury-les-Aubrais, patients hospitalized at their own request and those hospitalized against their will share the same premises: with Mahon, the ward is open to everyone. As for the achievement of Edouard Toulouse, which would mark its time, it inspired the significant Rucart Circular of 1937 and the Model Regulations of 1938, even though their practical application wouldn’t taken effect for another twenty years.
Le texte complet de cet article est disponible en PDF.Mots clés : Loi du 30 juin 1838, Asile d’aliénés, Hospitalisation psychiatrique, Psychiatrie, Histoire, Hôpital Henri-Rousselle, Emmanuel Régis, Gilbert Ballet, André Mahon, James Rayneau, Georges Raviart, Edouard Toulouse
Keywords : Law of June 30th 1838, Asylum, Psychiatry, History, Psychiatric Hospitalization, Henri-Rousselle Hospital, Emmanuel Régis, Gilbert Ballet, André Mahon, James Rayneau, Georges Raviart, Edouard Toulouse.
Plan
| ☆ | Toute référence à cet article doit porter mention : Caire M. Quelques éléments de l’histoire des premiers services ouverts en France. Evol psychiatr 2023; 88(2): pages (pour la version papier) ou URL [date de consultation] (pour la version électronique). |
Vol 88 - N° 2
P. 197-215 - juin 2023 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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