« L'histoire est la mère de toutes les sciences de l'homme » nous disait Michel Foucault. La discipline dite « infirmière » située dans l'ordre de l'humain au plan de la science a de la peine à dépasser ses propres mythes pour construire son savoir spécifique. Derrière le mythe du « tout infirmier » et ses clichés, les femmes soignantes francophones subissent encore au plan épistémologique une domination culturelle imposée à la fin du xviii^e siècle. À la discipline de s'approprier son histoire et à définir son objet. La recherche fondamentale commence à se développer au sein des facultés de sciences infirmières et permet à de nouvelles connaissances de s'appuyer sur un savoir antérieur remis en question. Des pratiques et des savoirs profanes accompagnaient l'émergence de cette prestation de service collective réclamée par le « prendre soin », mais les dominations culturelles successives subies et la complexité d'une activité ordinaire font que la discipline des soins est toujours orpheline sur le plan identitaire ; pas de nomos, pas de logos. N'étant pas dans l'ordre de la nature ou du vivant, la science infirmière (que pour notre part, nous ne nommons pas telle), son histoire et son discours dans le monde de la science se trouvent derrière le trièdre épistémologique des sciences humaines remarquablement décrit par Foucault. Borné d'un côté par les sciences sociales et, de l'autre, par les sciences médicales, mais antérieur à ces deux entités, l'objet de la discipline soignante se trouve « à la fine pointe des sciences humaines ».