Chapitre 14
Substituts lacrymaux

A. Rousseau, M. M’Garrech, , E. Barreau, L. Bonin, M. Labetoulle

L’essentiel

Les substituts lacrymaux (SL) constituent le traitement de première ligne de la sécheresse oculaire ; ils sont également des adjuvants indispensables pour la prise en charge de l’ensemble des pathologies de la surface oculaire. Bien plus que de simples « agents mouillants », les SL sont dotés de propriétés pharmacologiques spécifiques dont la variété ne cesse de s’étoffer. À côté des classiques solutions salines, des dérivés vinyliques et cellulosiques, les collyres aux carbomères ou à l’acide hyaluronique les plus récents ont permis d’augmenter la rémanence et les propriétés hydratantes des SL. De nouvelles classes voient le jour, palliant l’insuffisance de certains composés du film lacrymal (émulsions lipidiques) ou offrant de nouvelles actions pour aider à rétablir l’équilibre de la surface oculaire (osmorégulateurs, sécrétagogues). La connaissance de la palette des SL et de leurs propriétés est indispensable pour ajuster au mieux leur prescription face à une pathologie de la surface oculaire.

Les substituts lacrymaux (SL) constituent le traitement de première ligne de la sécheresse oculaire ; ils sont également des adjuvants indispensables pour la prise en charge de l’ensemble des pathologies de la surface oculaire (PSO).

Ils ont pour objectif d’augmenter le volume des larmes, de diminuer l’osmolarité lacrymale, et de lubrifier la surface oculaire et ainsi de la protéger de la dessiccation. Ils exercent également une fonction de dilution sur les allergènes et les médiateurs de l’inflammation. S’ils permettent une amélioration des symptômes et des signes des PSO, leur effet n’est le plus souvent que suspensif [1].

Il existe une grande diversité de SL qui contiennent différents agents pharmacologiques augmentant leur pouvoir lubrifiant, leur viscosité, leur rémanence et leur adhésion à la surface oculaire.

Généralement, les SL sont des solutions iso- ou hypotoniques tamponnées contenant à des concentrations variables des émollients, des agents de viscosité, des électrolytes et parfois d’autres composés (lipides, surfactants, composés osmorégulateurs, sécrétagogues, etc.). Historiquement, ils se présentaient sous la forme de flacons multidoses conservés, mais les unidoses ou les systèmes multidoses sans conservateurs sont de plus en plus courants.

L’analyse sémiologique, la recherche de l’étiologie et des mécanismes impliqués devant toute PSO sont primordiales pour déterminer la meilleure approche thérapeutique en termes de traitements étiologiques, mais aussi de SL.

Nous aborderons ainsi d’abord les différentes indications des SL, puis leurs propriétés pharmacologiques, avant de détailler classe par classe les différents traitements disponibles.

Indications des substituts lacrymaux
SÉCHERESSE OCULAIRE

La sécheresse oculaire constitue bien sûr la première indication des SL. Ils sont utilisés pour pallier un film lacrymal insuffisant en qualité ou en quantité et sont donc indiqués dans toutes les formes de sécheresse oculaire.

PATHOLOGIES ALLERGIQUES DE LA SURFACE OCULAIRE

Un des principes du traitement des pathologies allergiques de la surface oculaire est la diminution de l’exposition aux allergènes. Les SL, notamment les solutions salines, permettent une irrigation qui diminue la charge d’allergènes présents à la surface oculaire [2, 3]. Par ailleurs, les SL procurent un soulagement des symptômes liés à l’allergie en lubrifiant la surface oculaire et en diluant les sécrétions muqueuses. Les propriétés cicatrisantes et lubrifiantes des SL sont également utiles pour le traitement des ulcères vernaux. Dans tous les cas, ils ne constituent qu’un traitement adjuvant des traitements étiologiques propres aux pathologies allergiques.

PATHOLOGIES INFLAMMATOIRES DE LA SURFACE OCULAIRE

Les SL sont utilisés dans l’ensemble des pathologies inflammatoires de la surface oculaire. Dans les ulcérations et les infiltrats cornéens d’origine immunitaire, ils sont utiles pour favoriser la cicatrisation, lubrifier la surface oculaire et améliorer les symptômes. Ils apportent également un certain soulagement et sont indispensables pour stabiliser la surface oculaire dans le cadre des conjonctivites fibrosantes, qui s’accompagnent généralement d’une sécheresse oculaire sévère [4].

Là encore, les SL ne constituent qu’un traitement symptomatique, complémentaire du traitement étiologique anti-inflammatoire et/ou immunomodulateur.

PATHOLOGIES INFECTIEUSES DE LA SURFACE OCULAIRE

Les SL sont utilisés pour soulager les symptômes des conjonctivites et kératoconjonctivites virales [2]. Les solutions salines sont utiles pour nettoyer les sécrétions qui accompagnent ces pathologies. Il en est de même pour les conjonctivites bactériennes. Les SL facilitent la cicatrisation et réduisent la toxicité épithéliale des collyres anti-infectieux prescrits dans le contexte des abcès de cornée d’origine bactérienne, fongique ou amibienne, des kératites herpétiques et zostériennes.

KÉRATITES NEUROTROPHIQUES

Les SL ont leur place pour le traitement de tous les stades de kératite neurotrophique, quelle qu’en soit l’étiologie. En lubrifiant la surface oculaire, ils contribuent à préserver l’intégrité épithéliale et facilitent la cicatrisation des ulcères débutants. Ils gardent une place d’adjuvants aux traitements spécifiques des formes les plus sévères [5].

TRAUMATISMES DE LA SURFACE OCULAIRE

Les SL ayant des propriétés cicatrisantes sont toujours utiles pour le traitement des traumatismes mécaniques, physiques ou chimiques de la surface oculaire.

Principes pharmacologiques et propriétés des substituts lacrymaux

Les propriétés pharmacologiques des SL sont très étroitement liées à leurs propriétés physiques et chimiques.

VISCOSITÉ ET RÉMANENCE

La viscosité est considérée comme l’un des paramètres les plus importants des SL puisqu’elle permet une bonne couverture de la surface oculaire, influence le temps de résidence du SL dans le film lacrymal (rémanence) et les modifications optiques induites par son instillation [6, 7].

Sur le plan rhéologique, la viscosité peut être définie comme la résistance à la déformation d’un fluide en mouvement due au glissement relatif de ses molécules [8]. La viscosité s’exprime en pascal-seconde (la viscosité de l’eau est de 1 mPa⋅s) ; lorsqu’elle augmente, la capacité du fluide à s’écouler diminue. Pour mieux comprendre le comportement des SL sur la surface oculaire, il faut distinguer les fluides newtoniens, qui conservent une viscosité constante quelles que soient les contraintes de cisaillement (parmi lesquels on peut inclure les solutions les moins visqueuses), des fluides non newtoniens, pour lesquels la réponse de la viscosité varie de manière non proportionnelle à la contrainte. Sur la surface oculaire, les contraintes de cisaillement subies par le film lacrymal sont générées par les paupières et varient donc selon les phases du clignement. L’épaisseur du film lacrymal précornéen diminue en regard des bords palpébraux où l’amincissement maximal est matérialisé par une « ligne noire » lors de l’examen avec de la fluorescéine [9]. Ces zones de fragilité ont tendance à se rompre sous l’effet des contraintes du clignement, ce qui peut être corrigé par un film plus épais, mais également moins homogène et donc optiquement moins satisfaisant [10].

De Loubens et Magnin ont testé les propriétés rhéologiques d’un large panel de SL disponibles en France et en ont proposé une classification [10, 11]. Les produits newtoniens, de viscosité faible (de l’ordre de 1,5 à 2 mPa⋅s), conservent une viscosité constante durant toutes les phases du clignement. Il s’agit principalement des chlorures de sodium, des dérivés vinyliques et des solutions de glycérine. Les produits rhéofluidifiants (ou semi-visqueux ou encore pseudo-plastiques) se caractérisent par une viscosité qui diminue avec les contraintes de cisaillement (hyaluronates de sodium, dérivés cellulosiques). Ils ont une viscosité 10 à 100 fois plus élevée que les substituts newtoniens. Enfin, les substituts « à seuil d’écoulement » ou gélifiés, représentés par les carbomères, possèdent une viscosité très élevée au repos (105 à 106 mPa⋅s), qui diminue lorsqu’ils sont soumis à une contrainte supérieure à un seuil (« seuil d’écoulement » qui varie selon les carbomères et leur excipient) mais ne descend jamais en dessous d’un certain niveau (environ 102 mPa⋅s). Les produits à seuil d’écoulement élevé génèrent plus de troubles visuels, mais ont une meilleure rémanence.

Un autre concept intéressant est celui de thixotropie. La viscosité des fluides thixotropes, comme celle des rhéofluidifiants, diminue en fonction de l’intensité de la contrainte de cisaillement mais également avec la durée du cisaillement. Visqueux au repos, ils se liquéfient sous la contrainte et reprennent leur consistance initiale après un délai variable (quelques secondes à plusieurs jours). Il n’y a fondamentalement pas de différence entre un fluide rhéofluidifiant et un fluide thixotrope, si ce n’est la caractéristique « temps », qui est trop courte pour être mise en évidence dans le cas des fluides rhéofluidifiants. En pratique, on considère généralement que les carbomères et les cellulosiques ne sont pas thixotropes.

S’il paraît intuitif que la viscosité influence la rémanence des SL, le démontrer pose de nombreuses difficultés techniques et de nombreux autres facteurs peuvent intervenir in vivo. Meadows et al. ont mis au point une mesure de la rémanence basée sur l’ajout d’une macromolécule marquée par un agent fluorescent [12]. La concentration infime du traceur permet de ne pas modifier la viscosité du substitut lacrymal testé, son poids moléculaire élevé l’empêche d’être absorbée dans les tissus oculaires. Avec cette méthode, Paugh et al. ont démontré que les SL de haute viscosité ont un temps de rémanence deux fois plus long que le sérum physiologique chez des patients atteints de sécheresse oculaire. En revanche, les dérivés cellulosiques de viscosité modérée ainsi que les émulsions lipidiques n’ont pas un temps de rémanence statistiquement supérieur à celui du sérum physiologique [7]. Ces résultats rappellent que d’autres paramètres, comme l’adhésion à la couche muqueuse, influencent également la rémanence.

Pour résumer, une viscosité importante améliore la rémanence et l’effet couvrant d’un substitut lacrymal, mais risquera d’entraîner un flou visuel et pourra occasionner des dépôts en séchant. Les substituts lacrymaux devront donc trouver le meilleur compromis entre efficacité clinique, préservation optique et tolérance.

OSMOLARITÉ

L’hyperosmolarité lacrymale, schématiquement secondaire à l’hyperévaporation et au déficit de sécrétion aqueuse, est un des mécanismes physiopathologiques centraux de la sécheresse oculaire [13, 14]. L’hyperosmolarité est principalement secondaire à l’augmentation des concentrations ioniques (on parle d’hyperosmolarité cristalloïde). Elle entraîne une déshydratation des cellules épithéliales cornéennes et conjonctivales, qui peut être compensée par un afflux de solutés inorganiques qui endommagent le métabolisme cellulaire et peuvent conduire à l’apoptose [15]. Pour cette raison, certains SL visent à diminuer l’osmolarité du film lacrymal par le biais de formulation hypo-osmotiques. Toutefois, l’effet hypotonisant de tels collyres semble très limité dans le temps [16].

L’osmolarité colloïdale, liée à la concentration en macromolécules, joue également un rôle essentiel dans les flux transmembranaires. Certains auteurs ont postulé qu’une osmolarité colloïdale importante pourrait jouer un rôle favorable en exerçant un effet de déturgescence sur les cellules épithéliales en souffrance, dont l’altération des fonctions membranaires peut se traduire par un œdème [6].

PH DES SUBSTITUTS LACRYMAUX

Le pH physiologique moyen des larmes se situe autour de 7,5 [17]. Il est extrêmement variable et influencé par de multiples facteurs tels que la sécrétion lacrymale, les sécrétions des cellules à mucus, le métabolisme conjonctival, et les variations de concentration en CO2 (liées aux échanges avec l’air ambiant) [18]. Les données expérimentales et cliniques suggèrent que le pH lacrymal est influencé par les PSO. Celui-ci serait plus élevé en cas de sécheresse oculaire par hyposécrétion [6, 19], mais diminué chez les patients atteints de blépharite dans le cadre de rosacée palpébrale [20].

Le pH d’un collyre influence bien sûr le confort à l’instillation mais aussi l’activité du produit (pénétration, solubilisation) et sa stabilité. Les larmes ont un pouvoir tampon faible, mais toutefois suffisant pour abaisser ou augmenter le pH lorsque de petites quantités de solution modérément acide (pH > 3,5) ou modérément basique (pH < 10,5) sont instillées. De plus, le larmoiement réflexe induit par ces solutions irritantes entraîne la rapide dilution des ions H+ et OH en excès et contribue ainsi en grande partie à la normalisation rapide du pH (de l’ordre de 20 minutes) [21]. Ces deux mécanismes (effet tampon et dilution par le larmoiement réflexe) permettent théoriquement de favoriser un pH compatible avec l’activité et la stabilité du produit plutôt que de se limiter au pH physiologique lors de la mise au point d’un collyre.

Dans le cadre des PSO, la sensation d’inconfort au moment de l’instillation n’est pas seulement liée aux propriétés du collyre (et notamment son pH) : la sensibilité à la douleur et la réponse aux stimuli sont exacerbées par l’inflammation et la sécheresse oculaire [22]. Il est généralement admis que les collyres légèrement acides seraient mieux tolérés que ceux légèrement alcalins. Pourtant, une étude menée chez des patients atteints de sécheresse oculaire a montré que la tolérance de ces collyres était meilleure avec un pH neutre ou légèrement alcalin [23] et aucun travail n’a comparé la tolérance de SL alcalins ou acides. Enfin, la grande variabilité du pH lacrymal rend illusoire l’objectif de tamponner la surface oculaire défaillante avec un collyre.

Par conséquent, les SL ont généralement un pH quasi physiologique, sont dénués de conservateur détergent et sont formulés avec des substances viscosifiantes choisies pour leur tolérance. Le pH n’est probablement pas un paramètre différenciant permettant de choisir un SL plutôt qu’un autre.

COMPOSITION ÉLECTROLYTIQUE

Comme dans tous les fluides physiologiques, les électrolytes régulent les processus métaboliques dans le film lacrymal. Les ions bicarbonate aident par exemple au maintien de la couche muqueuse des larmes tandis que les ions potassium contribuent au maintien de l’épaisseur cornéenne [6]. Bien que nettement moins employés de nos jours, des substituts de composition électrolytique proche de celle des larmes avaient démontré leur capacité à augmenter la densité des cellules à mucus sur des modèles animaux, et à améliorer les colorations vitales et l’hyperosmolarité chez des patients atteints de sécheresse oculaire [24–26]. Toutefois, la rémanence de tels substituts ainsi que leur efficacité relative par rapport aux nouvelles molécules n’a jamais été évaluée. Actuellement, les électrolytes entrent dans la composition des substituts lacrymaux associés à d’autres composants qui en complètent les qualités.

CICATRISATION ÉPITHÉLIALE

Les SL facilitent la cicatrisation des épithéliums de la surface oculaire grâce à leurs propriétés lubrifiantes. Ainsi, ils amortissent, au moins en partie, les contraintes de cisaillement liées aux clignements, d’autant plus importantes qu’il existe des facteurs irritatifs mécaniques surajoutés (papilles ou follicules conjonctivaux, bord palpébral kératinisé, cils mal positionnés). En outre, certaines classes de SL auraient des propriétés cicatrisantes intrinsèques établies sur des études in vitro ou in vivo.

La carboxyméthylcellulose (CMC) se fixe au collagène et à la fibronectine, et favoriserait ainsi l’adhésion et la migration des cellules épithéliales cornéennes [27, 28].

Le hyaluronate de sodium (HS) facilite également la migration des cellules épithéliales, mais aussi leur prolifération, par des mécanismes impliquant des liaisons avec la fibronectine du milieu extracellulaire [29–36]. Le HS pourrait jouer un rôle de matrice extracellulaire temporaire sur le stroma cornéen dénudé [31].

Enfin, sur un modèle animal de kératite induite par les rayonnements ultraviolets, le tréhalose accélérait la cicatrisation épithéliale [37, 38].

PROPRIÉTÉS OPTIQUES

L’intégrité du film lacrymal et de l’épithélium cornéen est indispensable au bon fonctionnement optique de l’œil [39]. De nombreuses études ont montré que les PSO engendraient une irrégularité du film lacrymal et de la surface oculaire à l’origine d’aberrations optiques et de diffusions de la lumière perturbant l’acuité visuelle et la vision des contrastes.

À l’inverse, l’instillation de SL permet de restaurer, au moins partiellement et transitoirement, la régularité de la surface oculaire [40, 41] et donc ses qualités optiques. Les nouveaux outils d’évaluation objective des qualités optiques de l’œil ont permis d’objectiver ces effets bénéfiques qui n’avaient pas échappé aux patients et à leurs ophtalmologistes.

Nilforoushan et al. ont retrouvé une amélioration significative de l’acuité visuelle chez des patients atteints de sécheresse oculaire pendant quelques minutes après instillation de CMC [42]. Plus récemment, plusieurs auteurs ont rapporté une amélioration significative des aberrations optiques (sphériques ou de haut degré, selon les publications) sur des patients atteints de sécheresse oculaire modérée après instillation de collyre au HS [43, 44]. Les effets bénéfiques à court terme sur la vision des contrastes [40, 45, 46] ont été retrouvés par plusieurs équipes avec différents SL, sur des durées courtes. Une autre étude fonctionnelle a comparé les améliorations du temps de maintenance de l’acuité visuelle entre deux clignements chez des patients atteints de sécheresse oculaire après instillation de différents SL [47]. Enfin, Diaz-Valle et al. ont retrouvé une diminution de la diffusion optique intra-oculaire et des aberrations de haut degré après instillation de SL [48].

La durée de ces effets ne dépasse jamais quelques minutes et rend par conséquent nécessaires des instillations fréquentes. Pour améliorer ce paramètre, une des astuces possibles est d’augmenter la viscosité des substituts. Malheureusement, la viscosité nécessaire pour augmenter la rémanence engendre à son tour des irrégularités de surface, sources d’altérations optiques. Ridder et al. l’ont objectivé en mesurant la vision des contrastes dans les minutes qui suivent l’instillation de SL de viscosité croissante. Si les collyres de viscosité faible et modérée amélioraient en effet la vision des contrastes, les SL très visqueux provoquaient au contraire une diminution transitoire de ce paramètre [49], rendant compte du flou visuel dont se plaignent certains patients après instillation de SL de haute viscosité.

PROPRIÉTÉS OSMORÉGULATRICES

Les composés osmorégulateurs sont des solutés qui agissent comme des électrolytes pour équilibrer les pressions osmotiques de part et d’autre de la membrane cellulaire mais ils n’interfèrent pas avec le métabolisme cellulaire et peuvent donc améliorer la survie des cellules épithéliales soumises à un stress osmotique [50, 51]. Les osmorégulateurs utilisés dans les SL sont la lévocarnitine (L-carnitine), l’érythritol, le tréhalose, le glycérol et la taurine. Leurs propriétés sont détaillées plus loin (voir Collyres sécrétagogues).

Différentes classes thérapeutiques

La connaissance des différentes classes thérapeutiques des SL et de leurs propriétés pharmacologiques permet de mieux s’adapter à une situation donnée et d’associer des traitements complémentaires entre eux. Comme nous l’avons vu, les SL sont utiles pour la prise en charge de l’ensemble des PSO. Toutefois, les indications respectives des différentes classes ne sont codifiées que pour le traitement de la kératoconjonctivite sèche. Pour les autres pathologies, aucune étude n’a comparé l’efficacité des différents SL : la prescription sera donc guidée par l’effet thérapeutique souhaité et/ou les habitudes du prescripteur.

DÉRIVÉS DU SÉRUM PHYSIOLOGIQUE

Les dérivés du sérum physiologique, ou solutions salines, développés dès les années 1940, sont toujours largement utilisés. Leur efficacité dans la sécheresse oculaire est bien démontrée, ce qui rend d’ailleurs parfois difficiles les études d’efficacité des nouveaux traitements topiques de la sécheresse oculaire, car ils ne peuvent pas être considérés comme un « placebo ». Ils sont également utiles pour rincer les yeux et diminuer la concentration des allergènes dans les pathologies allergiques de la surface oculaire [2, 3]. Dans ce cadre, ils seront volontiers refroidis (en les plaçant au réfrigérateur) pour apporter un plus grand soulagement. Enfin, ils aident également à nettoyer les sécrétions des conjonctivites et kératoconjonctivites infectieuses.

Les caractéristiques des solutions salines disponibles en France sont présentées dans le tableau 14-1.

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Tableau 14-1 Solutions fluides et salines.

NR : non remboursé ; ppi : pour préparation injectable ; UD : unidose.

(Source : Vidal 2014.)

POLYMÈRES DE VINYL

Les polymères de vinyl sont des solutions de faible viscosité ayant comme avantage d’augmenter la stabilité du film lacrymal en abaissant la tension de surface de l’eau et en réduisant la tension de l’interface eau–huile. La rémanence est inférieure à celle des SL plus visqueux (comme les carbomères, les dérivés cellulosiques ou les collyres d’acide hyaluronique) mais leur impact sur la vision est négligeable [52, 53]. Les molécules les plus utilisées sont l’acide polyvinylique (PVA) et la polyvinylpyrrolidone (plus couramment dénommée povidone, polyvidone ou PVP).

Comme tous les SL développés il y a plusieurs décennies, les collyres au PVA et à la PVP n’ont pas fait l’objet d’études cliniques randomisées réunissant tous les standards méthodologiques désormais nécessaires au développement d’un médicament. Toutefois, des études ont utilisé ces molécules comme comparateur face à des SL plus récents. Les études comparatives des collyres de PVA à 1,4 % face aux carbomères ou aux HS donnent l’avantage à ces derniers, tant sur les signes cliniques que sur les symptômes (voir plus haut Cicatrisation épithéliale) [54–57].

Un essai sur un collyre de povidone à 2 % montrait une bonne efficacité sur les symptômes de sécheresse oculaire durant l’utilisation d’un ordinateur chez des porteurs de lentilles de contact [58].

Pour résumer, les polymères de vinyl représentent un traitement de première intention de la sécheresse oculaire et sont réservés au cas de sévérité légère à modérée, ou en association avec des SL de plus haute viscosité pour les cas plus sévères. Les caractéristiques des différents polymères de vinyl disponibles en France sont présentées dans le tableau 14-2.

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Tableau 14-2 Polymères de vinyl.

NR : non remboursé ; ppi : pour préparation injectable ; qsp : quantité suffisante pour ; UD : unidose.

(Source : Vidal 2014.)

DÉRIVÉS CELLULOSIQUES

Les polymères de méthylcellulose sont utilisés comme SL depuis près de 40 ans pour leur forte viscosité et leur pouvoir de rétention hydrique élevé. Actuellement, l’hydroxypropylméthylcellulose (HPMC ou encore hypromellose) et la carboxyméthylcellulose (CMC ou carmellose) sont les plus utilisées. La viscosité des dérivés cellulosiques varie selon le principe actif et sa concentration. Les produits de plus forte viscosité ont un temps de rémanence allongé, mais sont plus volontiers pourvoyeurs de flou visuel et de dépôts sur les cils et les paupières [12, 49, 59].

Du fait de leur ancienneté, les dérivés cellulosiques n’ont fait l’objet que de rares études randomisées contrôlées.

COLLYRES D’HPMC ET DE CMC

Plusieurs auteurs ont comparé entre eux des collyres de dérivés cellulosiques différents ou identiques mais à des concentrations différentes.

Grene et al. ont comparé un collyre au CMC et un autre à l’HPMC sur 56 patients atteints de kératoconjonctivite sèche (KCS) sévère et ont retrouvé une amélioration significativement supérieure des scores de coloration à la fluorescéine, des symptômes et du grade cytologique des empreintes conjonctivales chez les patients traités par CMC [59]. Simmons et al. ont comparé un collyre de CMC à 0,5 % (faible viscosité) à un collyre de CMC à 1 % (viscosité moyenne) sur 103 patients atteints de KCS modérée à sévère pendant 1 mois. L’amélioration des tests colorimétriques était supérieure dans le groupe de viscosité moyenne, au prix d’une fréquence accrue de troubles visuels. Il n’y avait pas de différence en termes d’amélioration des symptômes [60].

Deux autres études ouvertes ont analysé les résultats de gels à l’HPMC à 0,3 et 0,5 % sur des patients atteints de KCS modérée à sévère et ont retrouvé une amélioration significative des symptômes mais sans amélioration des tests colorimétriques [61, 62].

Deux études de petite taille ont comparé la CMC au HS. Dans la première, 22 patients atteints de sécheresse modérée à sévère ont été traités par HS à 0,18 % ou CMC à 1 % pendant 2 mois. Les deux traitements ont permis une amélioration significative et comparable des signes et des symptômes de KCS. Toutefois, l’amélioration des marqueurs d’inflammation de surface oculaire sur l’empreinte conjonctivale et le confort étaient meilleurs pour les patients traités par HS avec notamment plus de sensation de flou visuel après instillation de CMC [63]. Dans la seconde étude, 32 patients ont reçu du HS à 0,1 % ou de la CMC à 0,5 % pendant 2 mois en double insu. Il n’y a pas eu de différence significative sur l’amélioration des signes et des symptômes de KCS et la tolérance a été comparable dans les deux groupes [64]. Une étude comparant une émulsion lipidique avec de l’HPMC à 0,3 % et du HS à 0,15 % sur des patients atteints de syndrome sec par hyperévaporation a retrouvé des résultats en faveur de l’émulsion lipidique sur les tests colorimétriques et l’allongement du BUT (break-up time) [65].

INSERTS D’HPMC

La conception des inserts ophtalmiques d’HPMC remonte au début des années 1980 [66]. L’avantage théorique est bien sûr de réduire la fréquence d’instillation de SL tout en offrant une hydratation continue de la surface oculaire. L’insert est placé dans le cul-de-sac conjonctival inférieur avec un applicateur, à raison d’une fois par jour. Les premières études randomisées (mais de petite taille), comparant ce type d’insert à du sérum physiologique ou à des instillations pluriquotidiennes de méthylcellulose, ont permis d’établir son efficacité et sa bonne tolérance chez des patients atteints de KCS sévère, notamment dans le cadre de syndrome de Goujerot-Sjögren (SGS) ou de polyarthrite rhumatoïde [67, 68]. Plus récemment, une grande étude prospective ouverte multicentrique sur 520 patients atteints de KCS modérée à sévère a retrouvé une amélioration significative des signes et des symptômes de KCS grâce à ce traitement [69]. Les inserts d’HPMC ne sont pourtant plus disponibles en France depuis 2012.

Pour conclure, les dérivés cellulosiques forment une classe très hétérogène de SL et constituent pour la plupart un traitement de première intention de la KCS. Leurs propriétés cicatrisantes en font des SL de choix comme traitements adjuvants des ulcères cornéens d’origine mécanique, inflammatoire ou infectieuse. Les caractéristiques des différents dérivés cellulosiques disponibles en France sont données dans le tableau 14-3.

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Tableau 14-3 Dérivés cellulosiques.

ppi : pour préparation injectable ; UD : unidose.

(Source : Vidal 2014.)

CARBOMÈRES

Les carbomères sont apparus au début des années 1990 et constituaient alors une avancée considérable dans la prise en charge de l’œil sec, qui se limitait à l’époque au sérum physiologique et aux pommades vitaminées. Les carbomères sont des polymères obtenus par réticulation de l’acide acrylique par des éthers, qui a lieu dans des solvants organiques. Ce sont des macromolécules hydrophiles de grand poids moléculaire [70], classées en fonction du solvant utilisé pour leur synthèse. Le benzène, initialement employé pour la synthèse des carbomères, a été remplacé par d’autres solvants sans risque cancérigène. Les molécules de carbomères s’organisent en réseaux tridimensionnels capables d’emmagasiner de l’eau, d’où leur consistance de gel. Les gels de carbomères sont des fluides non newtoniens qui sont considérés, selon les auteurs, comme rhéofluidifiants [69] ou à « seuil d’écoulement » [10]. En pratique, le gel offre peu de résistance à la fermeture des paupières, mais retrouve sa viscosité lors de l’ouverture de l’œil. Le « seuil d’écoulement » assure une bonne couverture de la surface oculaire et un temps de rémanence prolongé [70]. Grâce à leurs interactions avec les mucines, les carbomères ont des propriétés mucomimétiques qui leur permettent d’être plus bioadhésives que les dérivés cellulosiques [71]. Le revers de cette qualité est les conséquences visuelles de cette classe – ils sont responsables d’un flou à l’instillation parfois prolongé –, et les dépôts sur les cils qui surviennent lors de la dessiccation du gel [72, 73].

Une des premières grandes études cliniques évaluant un carbomère contre un placebo est celle de Sullivan et al. (prospective multicentrique randomisée en simple insu) qui comparait le carbomère 934P à 0,3 % à son véhicule (solution de mannitol et de chlorure de benzalkonium) sur deux groupes de 60 patients atteints de sécheresse modérée à sévère. Il existait une amélioration significativement supérieure des signes fonctionnels, du BUT et du score au test de coloration au rose Bengale dans le groupe recevant le traitement. En revanche, la différence n’était pas significative sur le test de Schirmer et la coloration à la fluorescéine [73]. Plusieurs études ont comparé des collyres aux carbomères à d’autres types de SL. Laroche et al. ont constaté, sur 113 patients traités pendant 3 mois par collyre aux carbomères ou à la chondroïtine en ouvert, une amélioration significativement meilleure du score au test de coloration au rose Bengale chez les patients traités par carbomère ; toutefois le score de coloration à la fluorescéine était meilleur chez les patients recevant le collyre à la chondroïtine. Par ailleurs, il n’existait pas de différence sur le BUT, le test de Schirmer et les signes fonctionnels [72]. Les carbomères ont été également comparés aux dérivés cellulosiques et notamment l’HPMC : de petites études non publiées sur des durées courtes de traitement ont donné initialement des résultats contradictoires [70]. Plus récemment, une étude ouverte en parallèle sur trois groupes d’une vingtaine de patients atteints de syndrome sec et traités pendant 4 semaines (carbomère, dérivé cellulosique et émulsion lipidique) n’a pas retrouvé de différence significative sur les scores de coloration à la fluorescéine et le test de Schirmer. La tolérance des traitements était comparable dans les trois groupes et l’amélioration des symptômes était légèrement meilleure dans le groupe carbomère [74]. Les comparaisons des carbomères au PVA sont globalement à l’avantage des carbomères sur les symptômes et le BUT, avec des résultats moins concordants sur les tests colorimétriques et le test de Schirmer [54, 55, 75]. Johnson et al. ont comparé un collyre au carbomère 934 à 0,3 % et un collyre au HS à 0,18 % dans une étude randomisée en double insu sur 65 patients atteints de sécheresse oculaire modérée. Les deux traitements étaient équivalents en termes d’amélioration des symptômes et du BUT, mais le HS était supérieur au carbomère concernant les tests colorimétriques. Par ailleurs, les flous visuels prolongés après instillation étaient plus fréquents chez les patients sous carbomère [76].

De nombreux carbomères sont désormais disponibles en collyres conservés ou en unidose (leurs caractéristiques sont présentées dans le tableau 14-4). L’ensemble des résultats disponibles dans la littérature oriente plus une prescription dans les cas de sécheresse de sévérité modérée, en complément ou après l’échec des SL en solution. Leur prescription devra bien entendu tenir compte de leurs avantages et inconvénients propres à leurs propriétés biophysiques.

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Tableau 14-4 Carbomères.

ppi : pour préparation injectable ; qsp : quantité suffisante pour ; UD : unidose.

(Source : Vidal 2014.)

COLLYRES AU HYALURONATE DE SODIUM

Le hyaluronate de sodium (HS) est un glycosaminoglycane (disaccharide composé de N-acétylglucosamine et d’acide glucuronique en chaînes linéaires de poids moléculaire variable) présent en grandes quantités dans le vitré, mais aussi dans la matrice extracellulaire du derme et dans le liquide synovial. Grâce au grand nombre de charges négatives présentes sur la molécule, le HS est capable de retenir une quantité importante d’eau, ce qui lui confère une bonne capacité de lubrification [34]. Les collyres au HS sont des fluides non newtoniens, leur viscosité varie donc sous la contrainte : pendant le clignement, elle diminue, ce qui leur permet un bon étalement sur la surface oculaire. Entre les clignements, elle augmente, ce qui permet d’une part, de stabiliser le film lacrymal et d’augmenter le temps d’évaporation des larmes et d’autre part, d’augmenter la rémanence du HS sur la surface oculaire, qui est supérieur à celui du PVA et de l’HPMC [53, 77]. La viscosité des collyres au HS augmente par ailleurs avec la concentration en principe actif et diminue avec la température [78]. À des concentrations comprises entre 0,1 et 0,3 %, les collyres au HS améliorent la stabilité du film lacrymal [79].

En outre, de nombreuses études expérimentales in vitro et in vivo ont montré que le HS facilite la cicatrisation épithéliale en favorisant la migration et, pour certains auteurs, la prolifération des cellules épithéliales cornéennes [29–34]. Le HS jouerait un rôle de matrice extracellulaire temporaire sur le stroma cornéen dénudé [31]. Enfin, le HS offre aux cellules épithéliales une protection contre la toxicité de certains conservateurs [80].

Les études cliniques évaluant le HS ont été réalisées avec des collyres de formulations et de concentrations différentes (principalement 0,1 %, 0,18 % et 0,3 %). Concernant le HS à 0,1 %, plusieurs études randomisées en double insu, dont certaines de grande taille, ont pu démontrer une supériorité de ce collyre sur son véhicule [34], sur le sérum physiologique [81] et sur un collyre de PVA à 1,4 % [57]. Dans toutes les études, il existait constamment une amélioration significativement supérieure pour le HS sur les scores de coloration, mais moins constante sur le test de Schirmer et les signes subjectifs, dont les modalités d’évaluation étaient assez hétérogènes. Une étude a comparé le HS à 0,1 %, le HS à 0,3 % et le sérum physiologique. Les deux HS étaient supérieurs au sérum physiologique, mais une différence d’efficacité entre les HS 0,1 et 0,3 % n’était retrouvée que sur le BUT [82].

Comme cité plus haut, les études comparatives entre les collyres au HS et les dérivés cellulosiques n’ont pas retrouvé de supériorité clinique évidente du HS, mais une meilleure tolérance par rapport au CMC de viscosité modérée, surtout en termes de flou visuel après instillation [63, 64].

Le collyre au HS à 0,18 % est celui qui dispose du plus de données attestant de son efficacité clinique sur la sécheresse oculaire. Il est disponible sous la forme de solution hypotonique (150 mOsmol/l de HS). Les avis des commissions d’évaluation de la Haute Autorité de santé (HAS) résument l’essentiel des données cliniques disponibles pour ce collyre [83, 84]. Dans les études de Rapisarda et al. et Rolando et al. (toutes les deux monocentriques, en simple insu, respectivement sur 120 et 100 patients, non publiées), il était supérieur à un collyre d’HPMC sur des éléments cliniques objectifs et subjectifs. L’étude de Baudouin et al. (multicentrique, en double insu sur 151 patients) le comparait au sérum physiologique et retrouvait une supériorité du premier sur les symptômes et les signes cliniques de sécheresse oculaire [83]. Les mêmes auteurs ont ensuite testé dans une étude randomisée à trois bras le HS à 0,18 % face au sérum physiologique et à un carbomère pendant 3 mois. La supériorité du HS sur le sérum physiologique était à nouveau nette et significative sur tous les plans face au sérum physiologique, mais n’atteignait pas la significativité face au carbomère [85]. Enfin, une étude américaine de grande ampleur (444 patients inclus) a récemment confirmé l’efficacité du HS à 0,18 % en le comparant à son véhicule sur des patients atteints de sécheresse modérée à sévère : la supériorité du HS était significative sur la coloration au vert de lissamine et la fréquence des symptômes à J7. Toutefois, à J14, aucune différence n’était notée entre le HS à 0,18 % et son véhicule [86].

Les résultats des nombreuses études cliniques sont globalement concordants et émanent d’études méthodologiquement solides. Les collyres au HS permettent une amélioration des symptômes et des critères d’évaluation subjectifs de la sécheresse oculaire. Par conséquent, ce traitement reste une référence pour les patients atteints de sécheresse oculaire. En France, les collyres au HS sont indiqués dans le traitement de la sécheresse oculaire avec kératite ou KCS, en troisième intention après échec des substituts lacrymaux de faible viscosité et des gels.

Leurs propriétés cicatrisantes en font des SL de choix comme traitements adjuvants des ulcères cornéens d’origine mécanique, inflammatoire ou infectieuse. Les caractéristiques des différents collyres contenant du HS, disponibles en France depuis le début de l’année 2014, sont présentées dans le tableau 14-5.

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Tableau 14-5 Acides hyaluroniques.

LPPR : liste des produits et prestations remboursables qui définit, au-delà des médicaments, les produits qui sont considérés comme potentiellement importants dans la prise en charge thérapeutique globale (produits dont l’utilité médicale a été démontrée) et dont le coût sera, le cas échéant, pris en charge par l’assurance maladie. La LPPR est préparée par la Haute Autorité de santé (Commission nationale d’évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé) et elle est publiée au Journal Officiel. Pour chaque produit qui la compose, la LPPR définit un montant remboursable qui figure sur la vignette du produit sous la mention « tarif LPPR ». Le plus souvent, le prix public d’un produit de la LPPR est supérieur au montant remboursé par l’assurance maladie. La différence est prise en charge par le patient ou par son assurance complémentaire santé. Le prix public des produits de la LPPR est libre ; NR : non remboursé ; ppi : pour préparation injectable ; UD : unidose.

(Source : Vidal 2014.)

HYDROXYPROPYL-GUAR

Le guar est un galactomanane (c’est-à-dire un polysaccharide composé d’une chaîne de mannose à laquelle sont branchés des galactoses) d’origine végétale, hydrosoluble mais qui a tendance à se gélifier en phase aqueuse. Pour cette raison, il est associé à des groupements hydroxypropyl-guar (HP-guar) qui en garantissent une meilleure solubilité. Aux conditions de pH et de température du film lacrymal, les ions borate se fixent à la surface de l’HP-guar et transforment ce polysaccharide non ionique en polyélectrolyte anionique [87]. C’est notamment en raison de ces charges négatives que l’HP-guar agirait comme un mucomimétique et prolongerait la rémanence des agents émollients à la surface de l’œil. Sur des études expérimentales sur l’animal, la couche muqueuse (analysée en microscopie électronique) était significativement plus épaisse sur les lapins traités par ce collyre que sur ceux traités par un collyre au HS à 0,1 % ou à la CMC à 0,5 % [88]. Par ailleurs, ce collyre a montré de bonnes propriétés cytoprotectrices sur des modèles de dessiccation in vitro [89].

Plusieurs études cliniques ont comparé des formulations contenant de l’HP-guar à d’autres SL. Christensen et al. ont comparé un collyre à l’HP-guar à la CMC sur 87 patients, en double insu. Ils ont retrouvé une supériorité de l’HP-guar sur l’amélioration des colorations conjonctivales et de certains symptômes par rapport au collyre test [90]. Davitt et al. ont comparé un collyre à l’HP-guar à un collyre associant de la CMC à des composés osmorégulateurs dans une étude prospective, randomisée, en double insu et multicentrique sur 105 patients atteints de sécheresse oculaire. Après 1 mois de traitement, l’amélioration des scores de coloration conjonctivale était supérieure dans le groupe traité par HP-guar. En revanche, les deux traitements permettaient une amélioration comparable des signes subjectifs et de l’OSDI (ocular surface disease index) [91]. La plus grande étude menée sur un collyre à l’HP-guar est celle de Hartstein et al. incluant 168 patients. Il s’est agi malheureusement d’une étude prospective ouverte non contrôlée qui a retrouvé toutefois des résultats très positifs, avec une amélioration significative des symptômes mais aussi des scores de coloration conjonctivale chez 94 % des patients [92].

Les collyres à l’HP-guar sont indiqués dans le traitement symptomatique de la sécheresse oculaire, leurs caractéristiques sont résumées dans le tableau 14-6.

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Tableau 14-6 Gels d’HP-guar, émulsions lipidiques et osmorégulateurs.

LPPR : liste des produits et prestations remboursables qui définit, au-delà des médicaments, les produits qui sont considérés comme potentiellement importants dans la prise en charge thérapeutique globale (produits dont l’utilité médicale a été démontrée) et dont le coût sera, le cas échéant, pris en charge par l’assurance maladie. La LPPR est préparée par la Haute Autorité de santé (Commission nationale d’évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé) et elle est publiée au Journal Officiel. Pour chaque produit qui la compose, la LPPR définit un montant remboursable qui figure sur la vignette du produit sous la mention « tarif LPPR ». Le plus souvent, le prix public d’un produit de la LPPR est supérieur au montant remboursé par l’assurance maladie. La différence est prise en charge par le patient ou par son assurance complémentaire santé. Le prix public des produits de la LPPR est libre ; NR : non remboursé ; ppi : pour préparation injectable ; UD : unidose.

(Source : Vidal 2014.)

ÉMULSIONS LIPIDIQUES

Les sécheresses oculaires par hyperévaporation sont attribuées à une couche lipidique déficiente ou instable, le plus souvent secondaire à une dysfonction des glandes de Meibomius (DGM). Il paraît donc logique d’utiliser des SL contenant des lipides. De nombreux substituts de ce type ont été testés en clinique, dans des essais dont la méthodologie n’est pas toujours très solide. Par ailleurs, les émulsions lipidiques sont utilisées pour solubiliser des principes actifs liposolubles comme la ciclosporine A dans les collyres. Les émulsions lipidiques diffèrent par le type d’huile employé, la technique d’émulsion et le surfactant utilisé pour leur solubilisation.

Goto et al. ont testé une formulation à base d’huile de ricin à 2 % et d’huile de ricin polyoxyéthylénée à 5 % (plus hydrosoluble sous cette forme) contre un placebo (sérum physiologique) dans une étude randomisée en double insu de petite taille sur 20 patients atteints de DGM pendant 2 semaines, à raison de six instillations par jour. Les paramètres évalués (interférence lacrymale, évaporation lacrymale, BUT, coloration au rose Bengale) étaient significativement améliorés dans le groupe traité [93], mais cet essai n’a pas débouché sur la production industrielle d’un médicament.

Un collyre contenant de l’huile de ricin solubilisée par du polysorbate a été commercialisé au début des années 2000 en Amérique du Nord. Deux études ont retrouvé une amélioration des images d’interférence lacrymale après une instillation sur de petites séries de patients atteints de syndrome sec [94, 95]. Ousler et al. n’ont pas retrouvé toutefois de supériorité de ce traitement en termes d’allongement du BUT après instillation par rapport à un autre SL ne contenant pas de lipide [96].

Une émulsion aqueuse d’huile de soja et de phospholipides extraits du jaune d’œuf a été comparée, dans une étude monocentrique randomisée en simple insu (investigateur masqué), à un dérivé cellulosique et au HS instillés sur 4 mois. Contrairement aux deux autres collyres, les patients traités par l’émulsion avaient une réduction significative de l’osmolarité et du score de coloration conjonctivale. Une réduction significative du BUT était notée chez les patients traités par cette émulsion et par le HS.

Les émulsions d’huiles minérales ont montré de bons résultats pour augmenter l’épaisseur de la couche lipidique [97]. Dans une étude ouverte, Sindt et al. ont évalué l’efficacité à 4 semaines d’une formulation associant émulsion d’huile minérale et HP-guar sur 49 patients atteints de DGM légère à modérée déjà traités par SL. Les auteurs ont retrouvé une amélioration significative des questionnaires de symptômes liés à la sécheresse oculaire, des scores de coloration cornéenne et du BUT [98].

La technologie de la nano-émulsion cationique a été développée afin d’améliorer le temps de rémanence et la biodisponibilité de certains principes actifs lipophiles sur la surface oculaire. Les avantages théoriques de cette technologie sur les autres émulsifications (qui utilisent le plus souvent des surfactants anioniques ou non ioniques) sont :

  • d’une part, la création d’interactions électrostatiques avec les membranes cellulaires de la surface oculaire chargées négativement grâce à l’utilisation d’un surfactant cationique (chlorure de cétalkonium) pour augmenter le temps de rémanence ;

  • d’autre part, l’utilisation de nanoparticules dont la petite taille facilite la pénétration dans les cellules de la surface oculaire [99].

Initialement conçues pour servir de vecteur à des molécules lipophiles (comme la ciclosporine A), les nano-émulsions cationiques ont été utilisées seules pour substituer la couche lipidique déficiente. Une nano-émulsion cationique d’huile minérale en collyre a d’abord montré, dans une étude de phase 2, sa supériorité par rapport à un collyre au PVA concernant l’amélioration du BUT et l’amélioration de la coloration au vert de lissamine après 1 mois de traitement [99]. Aragona et al. ont ensuite comparé ce collyre avec une émulsion d’huile de soja et une formulation associant CMC et composants osmorégulateurs dans une étude en simple insu sur 71 patients atteints de syndrome sec modéré, traités pendant 3 mois. Le BUT et les colorations conjonctivocornéennes étaient significativement améliorés chez les patients traités par le collyre à la CMC et l’émulsion cationique, mais pas dans le groupe traité par l’émulsion d’huile de soja. L’amélioration des symptômes était meilleure dans le groupe traité par émulsion cationique que dans les autres groupes, mais ce résultat n’atteignait pas la significativité [99]. Cette même émulsion a fait récemment l’objet d’une étude prospective randomisée multicentrique en simple insu sur 85 patients (investigateur indépendant masqué) le comparant au HS à 0,18 % chez des patients atteints de sécheresse oculaire modérée déjà traités par d’autres substituts lacrymaux sans DGM franche. Le critère de jugement principal (non-infériorité de l’émulsion après 1 mois de traitement sur la diminution du score d’Oxford) a été atteint. Après 3 mois de traitement, il n’y avait pas de différence significative entre les deux groupes sur tous les paramètres évalués (score d’Oxford, test de Schirmer, BUT, score de qualité de vie, osmolarité, score d’évaluation des symptômes) [100].

On constate qu’il existe aujourd’hui de plus en plus d’émulsions lipidiques, dont les conceptions et les preuves cliniques d’efficacité sont très hétérogènes. De plus, ces collyres ont été testés sur des patients dont la sécheresse oculaire n’est pas toujours liée à une déficience du film lipidique. Nous nous permettrons donc de reprendre la conclusion du comité d’expert réuni sur le traitement de la DGM en 2011 : les résultats cliniques des collyres à base d’émulsions lipidiques sont très encourageants mais de plus amples études seraient nécessaires pour évaluer l’efficacité et la place de ces traitements selon les stades de gravité des DGM [101]. Les caractéristiques des émulsions lipidiques disponibles en France sont présentées dans le tableau 14-6.

OSMORÉGULATEURS

L’hyperosmolarité qui accompagne la sécheresse oculaire est la cause d’un « stress osmotique » qui endommage les fonctions des cellules épithéliales de la surface oculaire. Les altérations comprennent, notamment, l’apparition de ruptures des membranes cellulaires et des jonctions intercellulaires, une perte des microvillosités, l’augmentation des cytokines pro-inflammatoires dans le film lacrymal et des marqueurs cellulaires de l’inflammation, et conduisent finalement à l’apoptose des cellules épithéliales [13, 102, 103]. De nombreux micro-organismes, soumis à des variations intenses de l’osmolarité du milieu extérieur, ont développé des systèmes biologiques d’« osmorégulation » qui équilibrent le gradient osmotique de part et d’autre de leur membrane cytoplasmique afin d’assurer un niveau d’hydratation et de turgescence cellulaires compatibles avec une physiologie normale [104–106]. Ces processus font appel à l’accumulation intracytoplasmique de composés organiques : les « solutés compatibles » dont la concentration est finement adaptée à l’osmolarité du milieu extérieur et qui ne nuisent pas aux fonctions physiologiques. C’est ce mécanisme adaptatif dont s’inspirent les SL aux vertus « osmorégulatrices ».

TRÉHALOSE

Le tréhalose est un disaccharide naturel présent dans de nombreux organismes (levures, champignons, plantes, insectes, invertébrés), mais absents des cellules des mammifères [107]. Il est synthétisé en réponse à différentes situations de stress telles que la chaleur, le froid, l’oxydation ou la dessiccation. Les mécanismes d’action du tréhalose sont incomplètement élucidés, mais il agirait en partie comme un osmorégulateur, un stabilisateur des protéines (en prévenant leur dénaturation et leur agrégation) [107] et un stabilisateur de la bicouche phospholidique [108]. À ce titre, le tréhalose est étudié pour améliorer la cryopréservation de semences et les milieux de conservation d’organes ou de cellules souches [109–111].

Des études in vitro ont d’abord démontré que la transfection des gènes des enzymes de synthèse du tréhalose sur des fibroblastes humains les protégeait de la dessiccation [112], puis que des cellules épithéliales cornéennes soumises à un environnement hyperosmolaire résistaient mieux lorsqu’elles étaient traitées par une solution de tréhalose [113]. Plus récemment, des études in vivo sur des modèles animaux de sécheresse oculaire ont montré que l’instillation de collyres au tréhalose permettait une restauration de l’intégrité de la surface oculaire, une diminution de l’expression de marqueurs d’inflammation tels que la métalloprotéinase-9 et certaines interleukines, une diminution de la production de radicaux libres et de l’apoptose des cellules épithéliales [37, 111, 114].

L’utilisation de collyres au tréhalose en clinique remonte au début des années 2000. Matsuo et al. ont d’abord montré la supériorité de solutions de tréhalose à 100 et 200 mmol.l-1 sur le sérum physiologique chez 34 patients atteints de syndrome sec modéré à sévère [115]. Les auteurs ont retrouvé une supériorité du tréhalose concernant la diminution des scores de colorations conjonctivales et l’allongement du BUT. La même équipe a comparé ensuite le tréhalose avec un collyre au HS et un collyre à l’hydroxyéthylcellulose dans une étude randomisée en double insu sur 36 patients souffrant de sécheresse oculaire modérée à sévère. L’amélioration des signes et des symptômes de sécheresse oculaire était significativement meilleure chez les patients sous tréhalose [116].

Le tréhalose est disponible sous la forme de collyre en flacon sans conservateurs à la concentration de 3 % dans certains pays européens, mais pas encore en France.

LÉVOCARNITINE ET ÉRYTHRITOL

Ces deux composés osmorégulateurs entrent dans la composition d’un substitut lacrymal, en association avec la CMC à 0,3 % et la glycérine en flacon conservé. Une étude in vitro préliminaire avait montré que la lévocarnitine (un acide aminé) et l’érythritol (un polyol) ajouté au milieu de culture de cellules épithéliales cornéennes humaines protégeaient ces dernières contre le stress induit par l’hyperosmolarité [51]. Des études in vivo sur l’animal ont confirmé l’effet protecteur de ces composés sur un modèle murin de sécheresse oculaire : il existait sur les animaux traités une réduction de l’apoptose des cellules épithéliales cornéennes, une diminution de l’expression des cytokines inflammatoires et une augmentation du nombre de cellules à mucus [50]. Plusieurs études cliniques observationnelles ont évalué l’efficacité de cette formulation à court ou moyen terme [117, 118], mais peu l’ont comparé de manière randomisée et en double insu à d’autres substituts lacrymaux. Davitt et al. le comparaient à un substitut composé de polyéthylène glycol et de propylène glycol gélifié par de l’HP-guar dans une étude randomisée en double insu sur 105 patients atteints de syndrome sec de sévérité variable sur une durée de 6 semaines. Les scores de coloration étaient meilleurs pour le composé gélifié, tandis qu’il n’y avait pas de différence significative en termes d’amélioration des symptômes subjectifs dans les deux groupes [91]. Baudouin et al. ont comparé l’efficacité de l’association CMC–lévocarnitine–érythritol à celle d’une solution de HS dans une étude randomisée multicentrique en simple insu (investigateur indépendant en insu). Quatre-vingt-deux patients atteints de syndrome sec modéré à sévère étaient inclus [119]. Après 3 mois de traitement, les auteurs ont montré une non-infériorité du médicament testé sur le comparateur en ce qui concerne la diminution du score d’Oxford et de l’OSDI.

L’association CMC–lévocarnitine–érythritol est indiquée pour le traitement de la KCS, en troisième intention, après échec des solutés de faible viscosité et des gels.

COLLYRES SÉCRÉTAGOGUES
DIQUAFOSOL

Le diquafosol est un nucléotide dérivé de l’uridine, agoniste des récepteurs P2Y2 [120]. Les récepteurs P2Y2 font partie de la famille des récepteurs purinergiques, qui sont activés par des mononucléotides ou des dinucléotides polyphosphatés tels que l’adénosine triphosphate ou l’uridine triphosphate. Ces molécules sont habituellement intracellulaires, mais elles peuvent être relarguées dans le milieu extracellulaire dans des circonstances particulières tels des dommages cellulaires. Les rôles physiologiques de ces récepteurs sont multiples : ils interviennent notamment dans l’agrégation plaquettaire, le métabolisme lipidique, le métabolisme osseux, etc. Les récepteurs P2Y2 sont présents sur la surface oculaire, en particulier au niveau des cellules à mucus conjonctivales et les cellules épithéliales des acini meibomiens [121]. Des études sur l’animal et l’homme ont montré que :

  • la concentration lacrymale en agoniste des récepteurs P2Y2 augmentait lors de stimulations mécaniques (tels que le port de lentille de contact ou une augmentation forcée de la fréquence de clignement) [122–124] ;

  • le diquafosol et d’autres agonistes des récepteurs P2Y2 augmentaient la sécrétion lacrymale et la sécrétion de mucines, renforçaient la perméabilité de l’épithélium cornéen et accéléraient la cicatrisation épithéliale cornéenne [125–130].

Après deux études ayant confirmé la bonne tolérance et l’innocuité du diquafosol chez des volontaires sains puis atteints de sécheresse oculaire modérée [131, 132], plusieurs études prospectives, randomisées et en double insu, ont testé l’efficacité du diquafosol sur des patients atteints de syndrome sec par hyposécrétion (SSH) ou hyperévaporation. Dans une étude sur 527 patients atteints de sécheresse oculaire modérée à sévère, Tauber et al. ont retrouvé une amélioration des paramètres objectifs (score de coloration conjonctivale et test de Schirmer) chez les patients traités par diquafosol à 1 et 2 % instillé 4 fois/jour. En revanche, l’amélioration des signes subjectifs n’était pas statistiquement significative [133]. Plus récemment, Matsumoto et al. ont comparé l’efficacité du collyre au diquafosol à 1 % et 3 % instillé 6 fois/jour à un placebo dans une étude randomisée contrôlée sur 286 patients atteints de SSH. L’amélioration des scores de coloration conjonctivale était significativement meilleure chez les patients traités par diquafosol après 6 semaines de traitement. Parmi les 11 signes subjectifs évalués, seule la « sensation d’œil sec » était significativement améliorée dans les groupes ayant reçu le traitement [134]. Takamura et al. ont comparé dans une étude prospective randomisée en double insu l’efficacité du diquafosol à 3 % à une solution de HS à 0,1 % sur 286 patients atteints de sécheresse oculaire avec un test de Schirmer inférieur à 5 mm à 5 minutes associé à des scores de coloration conjonctivale élevés. Après 4 semaines de traitement, les deux groupes présentaient des améliorations significatives du BUT et des colorations conjonctivocornéennes à la fluorescéine, mais sans différence significative entre les deux traitements. En revanche, il existait une différence en faveur du diquafosol sur le test de coloration au rose Bengale [135]. Arita et al. ont étudié plus spécifiquement le diquafosol à 3 % chez des patients atteints de DGM. Sur 19 yeux de 10 patients, ils ont retrouvé une amélioration significative des signes et des symptômes de DGM après 4 mois de traitement, avec notamment une amélioration des scores meibographiques [136]. L’effet additif du diquafosol chez des patients traités par HS à 0,1 %, mais avec une réponse non satisfaisante à ce traitement, a été évalué par Kamiya et al. sur des patients atteints de SSH [137]. Les 32 patients inclus recevaient l’association diquafosol–HS et HS seul sur l’autre œil, utilisé comme contrôle. Les scores de coloration, le BUT ainsi que trois des 12 signes subjectifs évalués étaient significativement améliorés dans les yeux traités par l’association, tandis qu’ils ne l’étaient pas dans les yeux « contrôle », à 2 et 4 semaines. Aucun des deux groupes n’a eu une amélioration des valeurs du Schirmer. Une étude récemment publiée donnait les premiers résultats du diquafosol sur des périodes de traitement plus longues. Sur 15 yeux de 15 patients atteints de SSH (dont 13 étaient atteints de SGS) les signes objectifs (en dehors du test de Schirmer) et subjectifs évalués retrouvaient une amélioration significative à 1, 3 et 6 mois [138].

Le collyre au diquafosol permet donc une amélioration des scores de coloration conjonctivale, de la sécrétion lacrymale et de la DGM. Il offre un nouveau mode d’action pour le traitement des KCS par hyposécrétion, avec un bon profil de tolérance [139]. Son efficacité ne semble pas supérieure à celle du HS et sa place dans le traitement des différentes PSO reste à établir. Le collyre au diquafosol à 3 % est disponible en Chine et en Corée depuis 2009 et au Japon depuis 2010.

RÉBAPIMIDE

Le rébapimide est un dérivé de la quinolinone, un mucoprotecteur ayant une activité sécrétagogue sur les mucines, utilisé initialement au Japon, par voie orale, pour le traitement des gastrites et des ulcères gastriques. En raison de ces propriétés, les effets du rébapimide sur la surface oculaire ont fait l’objet d’études expérimentales puis cliniques. In vitro, le rébapimide induit l’expression des gènes de certaines mucines (MUC-1 et MUC-4) et la synthèse de dérivés glycoconjugués (reflétant la production des mucines) par les cellules épithéliales cornéennes [140]. De plus, le rébapimide protégerait la barrière épithéliale cornéenne des disruptions induites par certaines cytokines de l’inflammation [141]. Les études in vivo sur l’animal ont montré la capacité du collyre au rébapimide à augmenter la production de mucines par l’épithélium conjonctival et cornéen [142, 143]. La première étude clinique publiée a retrouvé une supériorité du rébapimide à 1 et 2 % contre un placebo (étude de phase 2, multicentrique, randomisée en double insu sur 308 patients atteints de sécheresse oculaire modérée à sévère) sur les signes fonctionnels, les tests colorimétriques et l’allongement du BUT après 4 semaines de traitement. Il existait une discrète supériorité du collyre à 2 % sur les tests colorimétriques [144]. Puis une étude de phase 3 en simple insu (investigateur masqué) a établi la non-infériorité d’un collyre au rébapimide à 2 % sur un collyre au HS à 0,1 % concernant les scores fonctionnels, colorimétriques sur des patients atteints de sécheresse oculaire traités pendant 4 semaines. La satisfaction des patients traités par rébapimide était supérieure à celle des patients traités par HS [145]. L’efficacité à plus long terme de ce traitement a été évaluée sur une série ouverte de 154 patients souffrant de sécheresse modérée à sévère traitée pendant 52 semaines. Les auteurs ont retrouvé une amélioration significative des paramètres objectifs et subjectifs à la première visite (deuxième semaine) et à la fin de l’étude, avec un discret gain entre les deux visites [146]. L’effet du rébapimide a également été étudié chez des patients atteints de kératoconjonctivite vernale ou de kératoconjonctivite atopique. Sur une petite série rétrospective de quatre patients, Ueta et al. ont objectivé une diminution de la taille des papilles tarsales après 6 semaines de traitement, chez des patients chez qui les anti-allergiques et les immunosuppresseurs locaux étaient sans effet. Mais l’importante hétérogénéité des traitements de fond reçus par les patients et parfois même leurs changements en cours d’étude rendent ces résultats difficiles à utiliser [147]. Enfin, Takahashi et al. ont traité 20 patients (33 yeux) atteints de kératoconjonctivite limbique supérieure (KCLS) secondaire à une ophtalmopathie dysthyroïdienne par collyre au rébapimide à 2 %. Après 4 semaines de traitement, les signes de KCLS ont disparu complètement sur 84,8 % des yeux avec une amélioration significative des tests colorimétriques et du BUT. En revanche, le test de Schirmer n’était pas significativement augmenté après traitement [148].

L’ensemble des travaux publiés sur le rébapimide émane d’équipes basées au Japon, où un collyre au rébapimide à 2 % est commercialisé depuis 2012. Sa place dans le traitement des pathologies de la surface oculaire reste à définir.

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